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reconnu plus tard ; il s’agit de lagunes indubitablement glaciaires. Le jour suivant, il rencontra des traces fraîches de chevaux, qui indiquaient que Frey avait déjà visité ce lac ; il passa la nuit aux bords du Fta-Leufu dans le même campement qu’avait quitté celui-ci en revenant de l’ouest à son champ d’opérations.

Les indigènes appellent le fleuve, dont la largeur est en cet endroit de cinquante mètres, le Carrenleufu ou « fleuve vert » à cause de la couleur de ses eaux, particulière aux cours d’eau qui naissent des glaciers. Suivant le chemin parcouru par Frey, Lange établit une station topographique sur une colline à l’ouest de la troisième lagune, à laquelle a été donné, dans notre carte, le nom de lac Cholila, et il parvint à dominer à l’est, à une distance d’environ trente-cinq kilomètres, les monts neigeux qui paraissent former une chaîne. Entre cette chaîne et la station, il ne vit que des montagnes isolées ou réunies en groupes coupés par de profondes gorges, accidents orographiques qui ont tous une direction longitudinale du nord au sud. Les rives du lac Cholila sont couvertes de cyprès et de ñires (planche XXVI). Du nord-ouest descend un fleuve volumineux. Au fond de la gorge du sud-ouest, qui est également assez étendue, se trouve un autre lac encore entouré d’un mystère qui sera dévoilé par d’autres explorateurs.

Le 19, Lange se dirigea au sud, côtoyant la rive marécageuse qui rendait la marche difficile. La vallée est très large en cet endroit et couverte de pâturages, de marais et de petits bois pittoresques. Le jour suivant, il arriva à un site où la vallée se resserre, fait qui provient de ce que le fleuve se rapproche des montagnes qui avancent à l’est jusqu’à rencontrer les roches presque perpendiculaires, pour reprendre ensuite leur direction générale sud-sud-ouest. Du sommet d’un coteau élevé, il put jouir d’une belle vue au nord, au sud et à l’ouest : au nord, la dépression longitudinale de Cholila et le Fta-Leufu serpentant au milieu de bois et de marais de couleur vert-clair ; au sud, un lac étendu dans le sens de la longueur, dans lequel débouche le fleuve, et à l’est, une large vallée limitée par des monts sans aspérités qui précédent le grand chaînon neigeux. Comme il était possible d’avancer même avec les mules, les voyageurs ouvrirent un chemin jusqu’au lac.

Toute la vallée de Cholila est très fertile. Les bois n’y ont pas, d’après Lange, le même caractère que dans l’Amérique du Nord ou en Scandinavie ; ils forment sur les versants de grandes taches alternant avec des clairières ou avec de vastes zones