Page:Moreno - Reconnaissance de la région andine, 1897.djvu/113

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
— 111 —

Les indiens du cacique Kankel, frère d’un des guides, chassaient dans le voisinage ; et le lendemain, de bonne heure, nous passions en face de la tolderia établie dans la pittoresque vallée du Chalia, à peu de distance de la Laguna Blanca, excellente région pour une colonie d’élevage où pourraient s’établir d’une manière permanente les indigènes qui l’occupent depuis un temps immémorial, sans craindre d’être délogés par les acheteurs de « Certificats de la Compagnie du Rio Negro ». La Nation a le devoir de donner en propriété des terres aux indigènes.

Les plateaux continuent à descendre graduellement vers l’orient, toujours herbeux, et recouverts de cailloux roulés et l’on n’y remarque pas de grands blocs erratiques. Nous suivons le bord du plateau de l’ouest, sur la plaine qui correspond à l’ancienne vallée du lac Buenos Aires, et sur laquelle se dressent isolés, des fragments du plateau plus élevé. À une distance d’environ soixante-dix kilomètres, on distingue à l’orient une chaine apparente composée de montagnes peu élevées, qui doit être celle située à l’est du rio Senguerr, dans sa déviation au sud.

Nous campons près de la rivière Chalia par une pluie torrentielle qui nous incommoda tout le jour suivant, en rendant infranchissables les tucu-tucales. Nous marchons au nord premièrement par la vallée du Chalia où il y a de petites moraines, jusqu’à sa confluence avec le rio Mayo, à l’endroit dénommé Yolk, où se trouve une gorge herbeuse qui nous conduisit sur le plateau précédant celui que nous avons traversé en allant au lac Buenos Aires. Ce plateau est horizontal comme les pampas, et sa végétation a perdu le caractère andin, à tel point que, le soir, le bois vint à nous faire défaut quand nous établîmes notre campement dans le site connu sous le nom de A’Ash, au bord d’une lagune qui me rappela celles de l’est de la province de Buenos Aires avec ses totorales et son manque de bords définis. Une élévation d’une vingtaine de mètres, choisie par les anciens indigènes pour cimetière et formée des restes d’une moraine, vestige des premières extensions des glaciers, domine une plaine plus basse, celle des lagunes de Coyet, qui se perd à l’orient, plaine limitée au nord par une petite colline, versant du plateau général. Des fumées qui s’élevaient de ce versant appelèrent notre attention, et vers le milieu du jour suivant nous arrivâmes aux trois toldos du chef gennaken Maniquiquen, établis vers les sources qui jaillissent à cet endroit. Le cours d’eau qui passait ici à une époque