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nous avons réalisé une entreprise peu commune, résultat de trois années de tentatives, qui ont prouvé jusqu’au dernier moment notre résolution et notre constance. Que l’expérience faite ne se perde donc pas, et que notre gouvernement profite bientôt des grands avantages que lui procure cette nouvelle voie en plaçant une immense contrée sous l’empire effectif des lois de notre République. »

Dans une autre partie de son travail, à propos du rio Aysen, il dit :

« Les eaux des autres rivières que nous avons parcourues sont noires, couleur résultant de la fonte des neiges à travers les terres végétales des versants des montagnes ; et les lacs, auxquels elles servent de débouchés et qui constituent probablement la division des eaux, ne pouvaient pas être bien loin, tandis que celles de l’Aysen sont vert-laiteuses, ce qui prouve leur origine distincte et la nature argileuse des terrains qu’elles traversent au-delà des montagnes. »

Parlant de la géologie des mêmes parages et de l’archipel voisin, il ajoute : « Mon idée est que la limite de l’ancien continent sud-américain, c’est-à-dire la Cordillère des Andes, quand les pampas étaient encore submergées, était l’Aysen ou ses environs, raison pour laquelle n’offre rien d’extraordinaire l’opinion à peu près confirmée qu’il existe des rivières qui traversent la Cordillère depuis l’est… »

« Dans l’après-midi, arrivèrent les explorateurs (ceux de l’Aysen), maigres et exténués mais contents, car ils avaient avancé l’espace de quatre à cinq lieues à l’intérieur d’un pays fertile et boisé, recouvert d’une épaisse couche d’humus, sur les rives du fleuve. Leur itinéraire s’était effectué, tantôt en suivant les hauteurs dominant le fleuve dont le cours s’inclinait un peu au sud, tantôt en longeant ses plages auxquelles nous pouvions accéder de temps en temps.

« Du point extrême où ils étaient arrivés, ils avaient vu derrière eux la Cordillère bien dégagée, ce qui prouvait que nous l’avions entièrement traversée… En amont, le fleuve présentait des rapides et des récifs avec un lit très encaissé, en sorte qu’il n’est pas navigable, pas même à partir de l’endroit où nous nous trouvions ; il serait plus facile d’établir le chemin à l’est en suivant la limite supérieure des talus. »

Le point où parvint le marin distingué ne correspond d’aucune manière aux régions que j’ai traversées, car s’il les eut atteintes, il aurait dit qu’il était arrivé aux plaines du Goichel et j’incline à croire qu’il n’a pas avancé dans d’aussi fortes