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en valeur de Helsingfors et un château à Borga.

Dolbret se sentait petit à côté de ces hommes dont la fortune était déjà faite, même à côté des aventuriers qui s’en allaient conquérir la leur, et il se demandait tristement si jamais il gagnerait de grosses sommes, s’il pourrait jamais oser prétendre à la main de Berthe Mortimer. Il faisait des projets, il imaginait des entreprises immenses, il se voyait travaillant comme un mercenaire jour et nuit pour jeter les bases d’une fortune colossale, puis, à force de peine et de misère, de génie, de travail, réussissant à prendre le dessus et enfin, après être sorti de l’ornière, marchant sûrement et fièrement dans la voie du succès. Les noms des hommes puissants hantaient son esprit : il pensait aux faiseurs de fortunes, au génial Cecil Rhodes, l’homme qui avait donné toute une contrée à son pays et dont les biens se comptaient par millions. Mais il revenait bien vite à la réalité quand il regardait les habits qu’il devait à la charité de ses semblables.

Depuis l’élévation de José au rang de garçon de table, Dolbret, Stenson et Wigelius ne se quittaient plus, ils conféraient toute la journée. Le premier soir, ils avaient discuté la question de savoir quel parti l’on pouvait tirer du voisinage de la cabine du Dean. Dolbret, prenant la parole, avait dit :

— Vous, Stenson, vous n’avez aucun intérêt à espionner — espionner est le mot — les agissements de ces gens-là, et je ne voudrais pas demander une chose comme celle-là à votre amitié.

— Je vous assure, avait répondu Stenson, que pour vous je ferais…