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le vois, de me trouver ici, faisant la guerre de guérilla. Mais que voulez-vous ? J’étais plein d’enthousiasme, plein d’ardeur et je croyais que le peu de savoir que j’ai servirait la cause du Transvaal. Illusion ! Mes conseils sont dédaignés, mes avis méprisés ; ces braves et nobles Boers n’ont qu’une science, la bravoure, qu’une tactique, l’entêtement. Alors j’en ai pris mon parti : ils n’ont pas voulu de ma stratégie, j’ai adopté la leur, je cours le veldt.

Après avoir prononcé ces paroles, d’un ton amer, il tendit sa main une dernière fois, ses compagnons en firent autant, ils descendirent le kopje et repartirent.

Durant les quelques minutes qu’avait duré cet entretien, Wigelius, agenouillé, avait soutenu Stenson dans ses bras. Le pauvre garçon venait de balbutier :

— Je me meurs !

Un flot de sang gicla de sa bouche ; ses yeux déliraient déjà, il n’entendait pas les paroles que ses amis essayaient de lui glisser à l’oreille. Un seul mot, le dernier, remua ses lèvres : Berthe !

Dolbret espéra que Wigelius n’eût pas entendu : en face de ce désespoir suprême, il avait honte de tous les bonheurs qui l’attendaient, lui.

Ils restèrent longtemps à contempler leur ami mort ; Zéméhul, le regard perdu dans le lointain, attendait, silencieux. La tempête avait cessé. Un souffle glacé leur fouetta le visage et ils entendirent des hennissements au-dessous d’eux.

— Partons, dit Pierre Dolbret tristement.

Ayant attaché le corps de Stenson sur l’un des chevaux, ils montèrent en selle et se mirent en marche. Kimberley apparaissait dans l’horizon clair du matin.