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— J’ai peur ! avait dit Zéméhul.

Pas un n’avait trouvé une parole pour le rassurer ; tous les trois, ils éprouvaient sans le dire ce que le naïf sauvage balbutiait d’une voix où chevrotaient des plaintes de petit enfant ; à chacun il restait juste assez de courage pour ne pas fuir, pour ne pas écouter les lamentations du guide, et leur seule force c’était l’inaction. Sans souci du danger, oubliant l’ennemi lancé à leurs trousses, ils restaient là, songeurs, comme arrêtés au bord d’un précipice ou acculés au pied d’une montagne.

— Bloemfontein ! murmura Zéméhul.

Personne ne bougea ; personne ne parla ; seuls, portés par le vent, des sons vaguement articulés, des appels criés dans le lointain, arrivèrent aux oreilles.

— Bloemfontein ! dit encore une fois Zéméhul en tournant son cheval.

Les trois amis se regardèrent ; ils semblaient se réveiller d’un songe.

Le même mot fut prononcé encore une fois :

— Bloemfontein !

Dolbret comprit qu’il fallait faire quelque chose de décisif. Sans s’occuper du Zoulou, il dit :

— C’est le temps de tuer ou d’être tué !

Puis s’adressant à Stenson :

— Vous avez votre poignard, John ?

— Oui.

— Vous aussi, Anton ?

— Oui.

Se tournant vers le guide, il le regarda dans les yeux et lui dit en articulant nerveusement ses mots :

— Tu as ton poignard, toi aussi, Zéméhul ?