Page:Morelles - Les diamants de Kruger, 1906.djvu/227

Cette page a été validée par deux contributeurs.
— 225 —

nerait pour mission d’aller chercher le trésor, il n’en est plus temps, ils ont emporté la description de la grotte et se sont sans doute emparés, à l’heure qu’il est, de ce que je considérais comme mon bien. »

Et il se désespérait ; il se prenait à regretter d’être venu, de n’être pas resté à bord du « Sardinian » ; il s’en voulait d’avoir cru au « trésor », d’avoir couru après une chimère, d’avoir lâché la proie pour l’ombre, de n’être pas retourné à Québec au prix de tous les sacrifices, de n’avoir pas eu recours à ceux qui voulaient l’aider, le régénérer par le travail. Les millions entrevus disparaissaient, ils s’évanouissaient comme une chose du passé, ils lui semblaient avoir peut-être existé, très longtemps auparavant, au temps des fées, mais ils n’avaient plus le charme qu’il leur avait trouvé la première fois qu’il en avait entendu parler. Sa vie d’autrefois lui revenait alors à la mémoire dans ses moindres détails : il se rappelait son enfance, ses années de grand séminaire, ses études de médecine ; puis les événements récents de son existence le hantaient avec encore plus de ténacité et passaient devant ses yeux avec plus de précision : il revoyait ses quinze jours d’attente après le directeur en chef de la maison Pâquet, puis enfin l’accueil bienveillant et encourageant de ce gros personnage. Les moindres incidents de cette journée où, s’il avait voulu, il aurait pu commencer sa fortune, lui réapparaissaient avec une netteté merveilleuse ; il avait encore dans les oreilles le tapage de l’immense édifice, le va-et-vient des légions d’employés, de la foule de clients ; le soir du 29 octobre se dessinait dans son esprit avec l’acuité d’une vision ; l’impression qu’il avait reçue de sa visite au sein