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LIVRE I.

bouffon, que le cardinal tolérait comme un badinage frivole.

« Pensez-vous maintenant que les gens de cour auraient en grande considération ma personne et mes conseils ?

« Je répondis à Raphaël :

— « Votre narration m’a fait éprouver une jouissance bien vive. Elle réunissait l’intérêt et le charme à une sagesse profonde. En vous écoutant, je me croyais en Angleterre ; car j’ai été élevé, enfant, dans le palais de ce bon cardinal, et son souvenir me ramenait aux premières années de ma vie. Je vous avais déjà donné mon amitié, mais tout le bien que vous avez dit à la mémoire du pieux archevêque vous rend encore plus cher à mon cœur. Du reste, je persiste dans mon opinion à votre égard, et je suis persuadé que vos conseils seraient d’une haute utilité publique, si vous vouliez surmonter l’horreur que vous inspirent les rois et les cours. N’est-ce pas un devoir pour vous, comme pour tout bon citoyen, de sacrifier à l’intérêt général des répugnances