aux plans les plus abſurdes, convenez que parmi ceux qui compoſent le Conſeil des Princes, les uns n’ont ni aſſez de tête, ni aſſez d’expérience pour ſe rendre aux bons avis, & que les autres ont trop d’amour propre pour ne pas adopter leurs idées à l’excluſion de toutes celles qu’on leur préſente. Telle eſt la loi permanente & invariable de la Nature, tel eſt ſon vœu univerſel ; elle a gravé en nous ce ſentiment délicieux, cet amour de préférence que tout être reſſent pour ſes productions. Ainſi le corbeau careſſe ſes pouſſins, qu’il couvre affectueuſement de ſon aile ; ainſi le ſapajou s’admire avec une ſorte de complaiſance dans les petits monſtres qui lui doivent le jour. Suppoſons donc que, dans l’aſſemblée de ces hommes jaloux, vains, & préſomptueux, un aſſiſtant ſe leve, & que, relativement à l’objet mis en délibération, il propoſe d’employer les meſures efficaces, priſes en pareille circonſtance dans d’autres tems ou dans d’autres pays ; alors tous ceux qui l’écoutent s’alarment & frémiſſent : on dirait que leur réputation de ſageſſe & d’habileté dépend du plus ou du moins de contradictions qu’ils doivent faire éprouver aux plans dont ils ne ſont point les auteurs & qu’il
