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étoit la seule à laquelle on fit attention, on en négligeoit deux autres, de la sortie des descendans d’Hercules, & de leur retour dans le Péloponnèse, depuis que Scaliger avoit déterminé le temps où il jugeoit qu’on devoit les placer, & l’on se privoit par-là de tout le fruit qu’on en pouvoit tirer. L’autorité de ce savant n’a pas imposé aux réviseurs, & la lecture des meilleurs auteurs leur a fait connoitre le temps auquel on devoit placer ces événemens : d’où il est arrivé que comme ils changerent autrefois toute la face du Péloponnèse, ils ont été obligés aussi de réformer les idées qu’on avoir d’une infinité de choses. Ils ont eu en cela l’avantage de s’accorder parfaitement avec le célébre chronographe Castor, dont tous nos modernes étoient contraints de s’écarter, quoique la plupart d’entr’eux avouassent que son autorité faisoit une espéce de loi.

Voila ce qu’on a fait pour rétablir dans le Dictionnaire les temps qui ont précédé la venue de N.S.J.C. Ceux qui la suivent n’ont pas été oubliés : les empereurs romains, tant ceux qui regnerent en Occident, que ceux qui firent leur séjour à Constantinople, ont paru mériter l’attention des réviseurs. On s’est aussi attaché à rectifier ce qu’il y avoit de défectueux, soit dans les listes des patriarches des grands siéges, ou dans les articles de chacun d’eux en particulier & on a eu soin par-tout d’établir l’uniformité dans la chronologie.

La maniere dont on a employé les diverses dates des olympiades, & des années de Rome, comparées avec les années du monde, & avec les années avant Jésus-Christ, paroîtra aussi très-commode. Les olympiades n’étant d’usage que dans la Gréce, ne devoient trouver place que dans les articles historiques de la Gréce, & des pays plus orientaux, qui ont été fournis aux Macédoniens : les années de Rome se trouvoient employées mal-à-propos, lorsqu’il ne s’agissoit pas de l’histoire de cette grande ville. On a suivi ce qui étoit conforme à la raison, parceque l’usage contraire étoit un défaut qui défiguroit le Dictionnaire.

Quoique le travail des réviseurs sur la Géographie ne soit pas si étendu, les personnes judicieuses trouveront qu’ils n’auront pas peu contribué à éclaircir cette science. On n’a point encore eu dans le Dictionnaire une description tant soit peu juste de divers pays, & l’on ne s’étoit pas embarassé d’y donner au moins une légere idée des provinces de l’empire romain. Un lecteur curieux qui croyoit y apprendre ce que c’étoit que la Dacie, ne trouvoit rien sur ce mot qui l’instruisît, ou plutôt il n’y trouvoit rien qui ne le jettat dans l’erreur, & il étoit trompé de même dans toutes les occasions où ceux qui avoient travaillé au Dictionnaire, n’avoient pas eu des modernes à copier. On a donc tâché de remédier à ce défaut, & l’on a même donné une suite des changemens & des révolutions arrivées dans chaque pays, toutes les fois qu’on a pu le faire.

Les Additions qu’on a faites à cette occasion sont en très-grand nombre : il y en a une infinité d’autres de toutes especes ; mais il y en a deux sur-tout dont il est nécessaire de dire un mot. La Bulgarie & la Dalmatie avoient été négligées jusqu’à présent, comme si les rois de ces pays ne faisoient aucune figure dans l’histoire. On n’avoit rien dit de ceux-ci, & on s’étoit contenté d’avouer qu’on ne savoit rien de ceux-là, quoiqu’une infinité de gens sachent que les François de Constantinople eurent à traiter avec de puissans rois de Bulgarie, qui ne contribuerent pas peu à détruire leur empire ; & que l’histoire des royaumes de Dalmatie, de Croatie & de Servie soit remplie d’une foule d’événemens d’autant plus importans, que sans elle l’histoire de l’empire Grec est très-imparfaite.

M. Du Cange avoit donné des suites historiques de ces royaumes, mais si défigurées par de fréquens anachronismes, que la vérité y étoit méconnoissable. C’est à quoi on a suppléé. On a débrouillé les divers rois, bans, archijupans de ces vastes pays ; on a montré en quel temps chacun d’eux a vécu ; on a fait observer l’étendue de leurs états dans les divers temps ; & ce détail se trouve non-seulement dans les articles particuliers de chaque prince, mais dans les articles généraux de la Bulgarie, Croatie, Dalmatie, Servie, &c. De sorte que cette partie de l’histoire qu’on avoit omises dans le Dictionnaire, parce-qu’elle étoit absolument inconnue, y est peut-être une de celles qu’on trouvera la mieux traitée.

Il y a d’autres additions dont il est presque inutile de parler parce qu’une nouvelle édition les suppose toujours : l’histoire moderne s’y trouve plus étendue & plus amplement traitée. On y avoit oublié des ordres & des congrégations très-célébres ; on n’avoit rien dit de plusieurs autres, qu’on n’eût copié dans des écrivains peu exacts. Tout est rectifié dans cette nouvelle édition ; chaque article est court, quoiqu’on n’ait rien omis de ce qui peut instruire & satisfaire le lecteur.

Après avoir exposé à peu près ce que le public trouvera de nouveau dans cette édition sur la chronologie, la géographie & l’histoire, il est nécessaire de l’avertir que la mythologie & la connoissance des usages des anciens ont été aussi l’objet des soins des réviseurs. Plusieurs articles sur ces matieres n’étoient pas capables de satisfaire ceux qui ont quelque connoissance de l’antiquité, & ils en donnoient une idée très-imparfaite a ceux qui les li-