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mée, au delà des ſources de l’Oxus à plus de quarante degrez du Tigre. Il ne faut croire nôtre Auteur, que ſous caution.]

ABARIS. Philoſophe de Scythie. Il portoit une fleche qu’il diſoit avoir reçue d’Apollon, & il alloit auſſi vite que cette fleche pouvoit aller, lors qu’on la décochoit d’un arc. Par ſon moyen il rendoit des Oracles, qui le faiſoient admirer de tout le monde & qui l’ont ſouvent fait paſſer pour un magicien. Il avoit apparemment quelque adreſſe, que nous ne connoiſſons pas, par le moyen de laquelle Abaris ſurprenoit les ſimples. Jamblique ſoûtient que ce Philoſophe Scythe a été diſciple de Pythagore, ce qui ne s'accorde pas bien avec ce que les Anciens ont dit, en ſoûtenant que cet Abaris vivoit même avant Solon : d’autres diſent que c’étoit du tems de Tullus Hoſtilius, ou d’Ancus Marcius Rois des Romains. On a auſſi crû qu’une Epître, que nous avons, adreſſée à Phalaris, eſt d’Abaris ; mais Lilius Giraldi, Voſſius & d’autres ſçavans Critiques eſtiment que c’eſt une piece de Lucien. Quoiqu’il en ſoit, on dit qu’Abaris retournant de Grece en Scythie, fit ce long voyage ſur ſa flêche. Herodote ajoûte, qu’il voyageoit ſans manger. Saint Gregoire de Nazianze parle de lui, dans la harangue funebre de Saint Baſile le Grand. Il écrivit en vers le voyage d’Apollon chez les Hyperboréens. Les Oracles pour la Scythie. Les Noces d’Hebrus. Et un livre intitulé les Expiations. * Strabon, li. 7. Cœlius Rhodiginus, li. 16. c. 22. Lilio Giraldi, dial. 3. de Poët. Voſſius, c. 3. de Poët. Grec. M. Bayle a donné lieu à la reformation de cet Article.

ABARUS, Chef des Arabes, qui trahit Craſſus, le faiſant donner dans une embuſcade, où il fut défait par les Parthes. Appien Alexandrin lui donna ce nom. Florus le nomme Mezeras de Syrie, Plutarque Andromachus, & Sextus Rufus, Abgare, ou Abagare, comme je l’ai déjà remarqué en parlant de ces Rois d'Edeſſe ou des Oſroëniens, en Syrie.

ABAS, douziéme Roi des Argiens, fils de Belus, ou, ſelon la plus commune opinion, de Lyncée & d'Hypermneſtre. Il fut conſideré par ſon eſprit & par ſa bravoure. Il eut pour ſucceſſeur Proëte : ou, comme d'autres diſent, Proclus, après avoir regné vingt-trois ans, ſelon Euſebe. Il eſt vrai que Pauſanias dit qu’Acriſius ſecond fils d’Abas, fut Roi d’Argos après lui, & que l’autre fut Roi de Tyrinthie, & du païis maritime de l’Argolide. C’eſt cet Acriſe, qui eſt pere de Danaé, & ayeul de Perſée. *Euſebe, in Chron. Pauſanias, li. 2. &c.

ABAS, Centaure, étoit fils d'Ixion & d'une nuée, & grand chaſſeur. Les Poëtes en parlent ſouvent, & entr’autres Ovide, liv. 12. Metam. &c.

ABAS, Capitaine des Latins en Italie, fit alliance avec Enée, & lui mena des troupes de Populonie, ville de Toſcane, vis-à-vis l’Iſle d’Elbe *Virgile, li. 10. Æneid.

ABAS, fils de Lynceüs & d’Hypermneſtre fille de Danaüs, bâtit une ville de ſon nom, dans la Phocide, Lyſander Capitaine des Lacedemoniens en fit ſon devin ; & il mérita d’avoir une ſtatue à Delphes. *Pauſanias, li. 10. [Il eſt difficile de ſavoir ce que l’Auteur veut dire par ces paroles Lyſander &c. Pauſanias ni les autres Auteurs, qui parlent de cette ville, ne diſent rien, comme il ſemble, qui ait dû donner occaſion à un ſi étrange galimathias, Abas étoit beaucoup plus ancien que Lyſander. On peut voir Stephanus & ſes Interpretes ſur le mot "Αβαι.]

ABAS, fils d’Hypothoon & de Melanire, fut changé en lezard par Cerès, offenſée des railleries piquantes qu’il avoit faites de ſes ſacrifices. Elle lui jetta deſſus certaines liqueurs mixtionnées, & elle imprima ſur ſa peau ces taches que nous y voyons encore, & qui la rendirent tavelée comme elle eſt. Ovide raconte un peu diverſement cette métamorphoſe : car il dit que Cerès offenſée de ce que ce jeune homme ſe moquoit d’elle, parce qu’elle avoit bû avec un peu trop d’avidité, le changea en ce petit animal. *Ovide, li. 5. Metam. fab. 6. Cœlius Rhodiginus, l. 19.

→ La temerité & l’inſolence de cet Abas exprime la malice du lezard, qui eſt l’animal le plus ennemi de l’homme, comme Pline le remarque, li. 30.c. 3. 10. &c. Les Latins l’appellent auſſi Stellio ; d’où les Juriſconfultes ont tiré le mot de Stellionat, qui ſignifie toute ſorte de tromperie & de fraude. Digeſt. 1. 47. Tit. 20. C. 9. 34.

ABAS, Philoſophe, qui laiſſa des Commentaires Hiſtoriques, & compoſa une Rhetorique. Quelques Auteurs, avec Voſſius, ont crû que cet Abas eſt le même que celui qui nomme Abro la femme de Candaule, laquelle fit aſſaſſiner ſon mari, pour l’avoir fait voir toute nue à Candaule ſon favori, comme Herodote nous l’apprend, dans le 1. Livre de ſon Hiſtoire. Et ils fondent leur conjecture ſur ce qui ſe trouve au livre 5. de la nouvelle Hiſtoire de Ptolomée Chennius ; dont il eſt fait mention en la Bibliotheque de Photius. Cod. 190. [Il y a eu un autre Abas, qui a écrit de la guerre de Troye, comme on le peut voir dans le même Voſſius.]

ABAS, Roi de Perſe. Cherchez Scha-Abas.

ABAS, Montagne. Cherchez Aba.

ABASCANTOS. C’eſt un des noms de l’Æon ou Dieu de l’Hereſiarque Valentin, comme nous l’apprenons de Tertullien, cont. Gnoſt. I.

ABASSENIE. Cherchez Habiſſinie.

ABASSIE. Cherchez Habiſſinie.

ABASSINIE. Cherchez Habiſſinie.

ABASSINS, peuples. Voyez Habiſſinie.

ABASTER C’eſt le nom d'un des trois chevaux qui tirent le char de Pluton, ſelon Bocace. Il ſignifie noir. Le ſecond nommé Metheus veut dire obſcur, & le troiſîéme Nonius ſignifie tiede. D’autres mettent quatre chevaux, qui ſont Alastor, Æthon, Orphne'e, & Nycte'e. *Claudien, de raptu Proſerp. lib. 1.

Orphneus crudele micans Æthonque ſagitta
Ocyor, & Stygii ſublimis gloria Nycteus
Armenti, Ditiſque nota ſignatus Alaſtor, &c.

Il faut conſulter Bocace, li. 8. c. 6. Geneal. Deor. Cartari, in imagini Deor. de Plut. Natalis Comes, &c.

→ Voici le ſens de cette fable myſterieuſe, comme le ſont preſque toutes les autres. Cette couleur ſi triſte & ſi lugubre qu’on donne à Pluton, que les Anciens croyoient le Dieu des richeſſes, fait voir dans le ſens moral, qu’il eſt difficile d’aquerir de grands biens ſans inquietude. Orphnée, qui ſignifie obſcur, eſt le premier qui traîne ce char, pour exprimer l’aveuglement de ceux qu’une lâche convoitiſe fait agir pour avoir des threſors. Alaftor, c’eſt-à-dire, malfaiſant, eſt le ſecond, pour faire ſouvenir qu’il n’y a point de crime que ce deſir immoderé d’avoir du bien n’inſpire : Ce qui fait que l’on regarde tout avec une ardeur extraordinaire, ſignifiée par le troiſiéme, Æthon, qui veut dire ardens. Enfin le dernier Nyctée, ou nocturne, marque que cette convoitiſe déraiſonnable conduit dans des tenebres, où il n’y a ni innocence, ni probité.

ABATlA, (Bernard) de Toulouſe, Médecin, Juriſconfulte & Mathematicien, a fleuri ſur la fin du XVI. Siecle. Il enſeigna le Droit, les Mathematiques, & les Langues à Paris & ailleurs. Il compoſa auſſi divers Traitez, dont les Auteurs de ce temps parlent avec éloge, & entr’autres la Croix du Maine, Bibl. Franc.

ABATON, Edifice à Rhodes, dans lequel il n’étoit pas permis d’entrer ; c’eſt pourquoi il fut ainſi nommé du mot Grec αβατ?, qui ſignifie, où on ne va point Voici quel fut le ſujet de la conſtruction de cet Edifice. Après la mort de Mauſole roi de Carie dans l’Afie Mineure, la Reine Artemiſe ſa femme ayant pris le gouvernement du Royaume, les Rhodiens ne purent ſouffrir qu’une femme regnât ſur toute la Carie, & armerent une Flotte pour ſe rendre maîtres de ce Royaume. Artemiſe étant avertie de leur deſſein, donna ordre qu’il y eût une armée navale cachée dans le petit Port d’Halicarnaſſe (qui eſt couvert d’une montagne, en ſorte qu’on ne voit pas ce qui s’y fait,) & que le reſte des gens de guerre parût ſur les remparts. Les Rhodiens ayant fait aborder leur armée navale proche du grand Port, la Reine fit donner un ſignal de deſſus les murailles, pour faire entendre que la Ville vouloit ſe rendre. A ce ſignal, les Rhodiens ſortirent de leurs vaiſſeaux pour entrer dans la Ville : & auſſi-tôt Artemiſe fit ouvrir le petit Port, d’où ſortit ſon armée navale, qui entra dans le grand Port où étoient les Vaiſſeaux des Rhodiens vuides de ſoldats, & les emmena en pleine mer. En même tems, les Rhodiens qui n’avoient plus aucun moyen de ſe retirer, furent tous tuez dans la place publique, où ils ſe trouverent enfermez. Ce ſtratagême ayant ſi bien reuſſi, la Reine mit de ſoldats & de ſes matelots dans les vaiſſeaux des Rhodiens, & alla droit à l’Iſle de Rhodes. Les habitans voyant venir leurs vaiſſeaux, ornez de Couronnes de Lauriers , reçurent leurs ennemis, croyant que c’étoient leurs gens qui revenoient victorieux. Alors Artemiſe, après avoir pris Rhodes, éleva un trophée dans la Ville, avec deux ſtatues de Bronze, dont l’une repréſentoit cette Reine, & l’autre la Ville de Rhodes en habit d’eſclave. Long-tems après, les Rhodiens n’oſant abattre ces ſtatues, parce que les trophées étoient des choſes ſacrées, que leur Religion ne permettoit pas de détruire ; ils s’aviſerent, pour en ôter la vûe, de bâtir autour un Edifice fort élevé, qu’ils appellerent Abaton, parce que l’entrée en étoit défendue à toutes ſortes de perſonnes. *Vitruve, li. 2. c. 8. SUP.

ABATOS, c’eſt-à-dire, inacceſſible, Iſle d’Egypte, dans le Palus de Memphis. Elle étoit renommée par le tombeau du Roi Oſiris, & par ſon lin & ſes feuilles de palmier, dont les Anciens faiſoient des tablettes à écrire. Le Poëte Lucain en fait mention, liv, 10.

Hinc, Abaton, quam noſtra vocat veneranda vetuſtas
Terra potens.

ABAVI ou Abanhi qu’on croit être l’Aſtapus de Ptolomée, fleuve d’Egypte. Il eſt ſans doute le même qu’Abanbo, dont j'ai déjà parlé. Il a ſa ſource au mont Amara dans l’Ethiopie. Il reçoit l’Aſtaboras, que quelques-uns nomment Tacaſſi, & d'autres Tacui, & Coror (Marmol le nomme Tagazin) & ils ſe jettent dans le Nil, à l’Iſle de Meroé. *Mercator, in Theſ. Geogr. Marmol, lib. 10. c. 10. Le Noir, Vincent le Blanc, Voſſius & Pontanus, li. I. oran.

Aſtapus & ſocio jungit ſua flumina Nilo,
Jungit & Aſtaboras, &c.

ABAUNAS, Lac. Cherchez Aſtamar.

ABAZE'E. Cherchez Sabazie.

ABBA ou Abbadal-Curia, petite Iſle dans hla mer d’Aïan de Zanguebar. Elle n’eſt pas éloignée de la Zocotora, ou Dioſcoride. On a même crû qu’elle en faiſoit partie.

ABBADAL-CURIA, Iſle. Cherchez Abba.

ABBAHUIS. Cherchez Nil.

ABBE' ; C’eſt le nom d’un Prélat, qui eſt le Chef d’un Monaſtere de Religieux ou de Chanoines Reguliers. Il vient du Syriaque Abba, c’eſt-à-dire, Pere. Autrefois on appelloit tous les Religieux Abbez, comme on les nomme aujourd’hui Peres. Les Genois donnoient auſſi le nom d’Abbé au Chef de leur République, comme il paroît par le Traité fait entre Charles Roi de Sicile & cette République l’an 1320. où Nicolas Frambe eſt ſouvent nommé Abbas populi. Il y a des Abbez Cardinaux, c’eſt-à-dire, qui ont le titre de Cardinal ; & ce titre a été accordé à l’Abbé de Cluni, comme il ſe voit dans la Bulle du Pape Caliſte. On a appellé dans un autre ſens, Abbé Cardinal, un Abbé en chef : lors que deux Abbayes, qui avoient été unies, ont été ſeparées & ont chacune eu leur Abbé particulier. On donnoit encore le nom d’Abbé aux Curez primitifs. Car anciennement toutes les Paroiſſes avoient trois principaux Officiers ; ſavoir l’Abbé, ou le Gardien, qui eſt maintenant le Curé : les Prêtres, ou Chapelains : & le Sacriſtain, qui étoit au deſſous de l'Abbé &

des