Page:Montreuil - Cœur de Rose et Fleur de Sang, 1926.pdf/50

Cette page a été validée par deux contributeurs.
56
CONTES ET NOUVELLES

« La dernière nuit que je passai dans la maison où j’avais été élevé et qui le lendemain devait être mise aux enchères, on me laissa seul ; nul ne vint troubler l’amertume de mes réflexions par des offres de service, que j’avais encore la naïveté d’espérer. Je pus, tout à mon aise, faire le procès de l’humanité, et je pensai que ce que je perdais ne valait point un regret.

« Avant le jour, je pris les habits que je portais la veille, et allai les jeter sur la grève, pour faire croire à un suicide. Et l’on y crut. On eut raison d’y croire, car Josuah Nelton, le oisif, le naïf était bien mort, en dépouillant ces vêtements élégants. Mais de son expérience, il était né un autre homme, libre, sans le sou, et qui emportait pour tout, bien sur les routes de son pays, une profonde connaissance du cœur humain et un plus profond dégoût de la société.

« Déguisé et emmenant seulement mon chien, je partis vers l’inconnu. J’en-