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ACADÉMICIEN

livres. Une femme met un soin total à décrasser les bobèches alourdies de cire. « Il n’y a plus que cinq béguines, nous dit-on, tandis que l’une d’elles passe, vêtue d’étoffe sombre. Celle-ci est encore jeune. La grande dame est morte l’an dernier. La vie est chère et les béguines ont chacune une maison où elles vivent avec une servante. » Aussi les maisons grises se ferment-elles parmi l’herbe qui gagne.

Et mes yeux s’arrêtent longuement sur le Lac d’amour, vert sous le soleil, au milieu de pignons rouges, anciens et naïfs comme des motifs de dentelle.

D’Ostende, que nous touchons à peine, il ne nous reste que le souvenir d’un regard vers la mer, d’un savoureux dîner de plage et d’un décor que la morte-saison attriste.

Anvers est une ville puissante et riche qui commande la mer par l’Escaut. Je m’y attarderais volontiers. Après une promenade sur la terrasse qui domine le port — je songe à ce que pourrait être celui de Montréal — nous revenons à la Place Verte où se dresse le bronze qui immortalise Rubens. La cathédrale abrite quelques-unes des plus belles œuvres du maître : couleur, expression, mouvement, se gravent en nous pour la vie.

Nous parcourons Malines, rapidement. Beaucoup de maisons ont été reconstruites et des coins délicieux demeurent. Nous y retrouvons d’autres merveilles de la peinture flamande. Et nous nous hâtons vers Son Éminence le Cardinal Mercier, qui veut bien nous recevoir. Le Palais est de style sobre, entouré d’un jardin tranquille. Pendant que nous attendons, le carillon de la cathédrale joue la Brabançonne et les notes de bronze s’élèvent comme un chant hésitant et perdu.