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SOUVENIRS

trape au point final, en se jouant, avec une merveilleuse élégance.

Le Maréchal Foch porte un vêtement noir sans recherche. Son regard est droit, légèrement voilé mais si plein. Le teint est frais, les traits reposés. Si sa figure n’était pas universelle, on penserait : c’est un industriel du Nord ou un ancien ministre.

Il parle avec bonne humeur, sans longues phrases, à la militaire. Sa voix est un peu saccadée. Les mots semblent des coups de pinceau jetés sur une toile. Ils disent l’effort militaire du Canada français et l’héroïsme de nos soldats qui, en plus d’une circonstance, ont fait l’admiration des généraux français. Allocution émouvante qui termine cette réunion où, après M. Philippe Roy et M. Barthou, j’avais remercié notre hôte et nos amis français et canadiens.

***

Avant de partir pour La Haye je fais un saut à Londres, le temps de prendre une photographie des délégations de l’Empire dont on avait souhaité que je ne sois pas absent. Je me serais bien passé de ce sacrifice aux Archives qui exige le passage du Détroit.

Je fais un bon voyage : en britannique, sans dire un mot à qui que ce soit et en acceptant flegmatiquement que personne ne me parle.

J’ai retrouvé Londres un peu plus vert que l’an passé, mais aussi profondément monotone. Comment la Manche a-t-elle produit sur chacun de ses bords deux civilisations aussi différentes !

C’est un mystère attribuable sans doute au climat que cette froideur digne, cette réserve, cette sorte de silence : une ville sans cris, sans rire, sans autre bruit que celui des autobus. Picadilly Circus