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PRÉSENCES

des pigeons et même une pintade. Comment ne pas les observer ?

Les poules animent la basse-cour de leurs cris, de leurs gloussements et de mille mouvements de bec, de cou, de pattes et d’ailes. Elles accourent à l’appel de la fermière, se rangent en rond à ses pieds et suivent d’un piquement bref le désordre du grain qui tombe. Elles vont sur la route, si on les laisse libres, et trouvent partout à picorer. Préoccupées de leur pitance, elles comprennent mal que l’auto les dérange. Au fond elles donnent l’impression d’être un peu bêtes. On ne sait jamais où elles dirigeront leur agitation. Elles se décident soudain à courir dans le sens opposé à la normale. Ce sont les poules en liberté, les vraies poules de basse-cour, brunes, grises ou blanches, et je suis d’accord avec Bedel pour les préférer au troupeau sorti des couveuses qui peuple de ses taches monotones les immenses poulaillers de commerce.

Le coq est un roi. Il est hésitant, flâneur et prétentieux. Paillard, naturellement. Et sournois ; c’est du moins l’impression qu’il me donne. La pauvre bête n’est sûrement pas tout cela. Il est beau d’ailleurs, cambré du col et des reins. Sa crête et ses yeux lui donnent quelque chose d’apoplectique. C’est notre emblème. Le coq de France domine le clocher de nos églises. Je ne connais pas de plus émouvant symbole.

Le dindon est gênant avec sa crête en pendentif. Pourquoi en a-t-on fait le type de la sottise ? Le fait est qu’il est balourd et semble égaré. Ses mouvements de gorge débordent de prétention. La dinde est fine de ligne, dodue et docile. On en mangerait. Le jars est un majordome affairé, l’oie une mère admirable et les oisons des amours. Quel