Page:Montpetit - Souvenirs tome III, 1955.djvu/159

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
159
VERS L’OUEST

compris magnifiquement l’idée chère à Charles Gide de la « richesse-service ».

Le jardin est respecté du public. Il est d’une propreté telle qu’un ami murmure près de moi : « Je n’ose pas jeter ma cigarette ». Des employés — quatre blancs et onze chinois — circulent, silencieux. Je considère un Oriental penché sur des fleurs : chemise bleue, pantalon étroit, petit feutre conique, figure alanguie, maigre et vieillotte.

Une excursion nous élève vers un sommet de douze cents pieds d’où nous apercevons le Mont Baker. Le paysage est très accidenté. Toujours les rochers jaunis, brûlés, les arbres verts, les eaux bleues : une carte aérienne aux couleurs passées. Une impression d’automne.

***

Le lendemain, nous revenons vers Vancouver. J’assiste à l’entrée de notre navire dans le port par l’English Bay qui donne l’illusion d’un voyage vers l’Alaska. Je dénombre une série de plans où pénètre le fjord.

L’Université nous reçoit. Comme celle de San Francisco, elle a d’abord bâti des immeubles non pas sans doute de fortune, mais temporaires : en stuc, pour cinquante ans. Je suppose qu’ils dureront plus longtemps, comme tout ce qui est temporaire. Puis elle a élevé trois édifices, d’un caractère permanent, destinés à la Faculté des sciences, à la bibliothèque et aux chaufferies.

La bibliothèque est impressionnante : gothique Tudor, grès solide, poutres apparentes, électroliers de métal et, tout autour, les écussons des universités canadiennes. Elle est riche aussi et éclectique. Je suis ravi d’y trouver une collection d’ouvrages français, classiques ou contemporains, qui