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SOUVENIRS

Louis Hémon. Des fleurs : pensées, marguerites, boutons d’or, roses, quelques fougères, des géraniums blancs, des iris bleus, des glaïeuls. Une pierre tombale : « Ici repose Louis Hémon, homme de lettres, né à Brest, France, le 2 octobre 1880, décédé à Chapleau le 8 juillet 1913. Hommage de la Société Saint-Jean-Baptiste de Montréal, 1920 ». Il dort au milieu du pays triste et sauvage qu’il a chanté.

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Le train poursuit sa course. L’inépuisable Plateau est amorti par la chaleur : roches brûlées à blanc, épinettes amaigries, lacs endormis sous le plomb du jour. Ici et là, dans le vide de cette nature oubliée, des maisons de bois de type nordique. Comment peut-on habiter cette solitude ! Pour nous, le spectacle du Plateau est familier. C’est celui qui, adouci, borde l’horizon de Montréal. Dans la région du Lac Supérieur, que le train contourne, il s’élève et domine : les monts plongent dans les eaux et leurs replis retiennent des vasques d’un vert profond.

Ce décor que nous suivons longtemps, auquel le convoi communique son mouvement déchiré, ponctué de cris sans échos vivants, combien je le préférerais à l’automne, quand le ciel dégage lentement sa pureté des brumes du matin pour que les reflets des arbres roux se noient dans le bleu des eaux innombrables.

Tout de même les hommes sont là : des centres désespérément attendus dressent leurs silhouettes. Les villes jumelles de Fort William et de Port Arthur, puis Winnipeg à la clef de la Prairie.

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