Page:Montpetit - Souvenirs tome II, 1949.djvu/162

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
161
JOSEPH BARIL

par la recherche de ses sujets, par ses coquetteries de couleur locale, par la tournure de ses railleries. Il prisait la pointe et le mot, le mot vrai, ramassé dans la rue, monté d’une cour ou germé dans la serre chaude des salons. Il avait le sourire, comme on dit au Quartier. Et ce n’est pas tellement répandu parmi nous qu’il ne vaille pas la peine de s’y arrêter. Il s’amusait de nos habitudes nouvelles où il distinguait du snobisme, et il mettait volontiers en parallèle notre laisser-aller yankee et nos prétentions au génie latin.

Il revenait à pied, chaque soir, des rues troublées par les affaires vers l’intimité du foyer, évitant l’encombrement des tramways, l’heure du win the car :

« Je montais à petits pas la rue Saint-Hubert, goûtant avec un plaisir extrême la pureté de l’air et la poésie de la nuit tombante. Cette promenade quotidienne, après le bureau, à l’heure où dans les salons les lampadaires s’allument, projetant jusque dans la rue, à travers les persiennes mi-closes, leur lumière chatoyante, a pour moi un attrait toujours nouveau. Je marchais en songeant… Mon Dieu ! je ne sais plus à quoi, à toute sorte de choses…