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PARIS

Le printemps nous arrive : les fiacres vont se découvrir et laisser voir enfin ce qu’ils renferment.

Il n’est pas rare, à cette époque particulièrement tentatrice, de voir passer le long des murs, sans gêne aucune, absolument absorbés, deux amants qui s’embrassent et qui s’en fichent. Le sergent de ville, habitué, sourit, et le gamin de Paris ne manque jamais de lancer aux amoureux quelques-uns de ces mots dont il a le secret, et qu’il jette d’un ton traînard et enroué.


Le gamin de Paris, le camelot, l’apache ! Voilà des types, des vrais et qu’on ne rencontre pas souvent ailleurs. Fleurs de pavé comme on les appelle. Les apaches vont lentement, jamais pressés, les deux mains enfouies dans leur vaste pantalon de velours, un bout de cigarette au coin de la lèvre, les cheveux courts, la figure émaciée, une ceinture rouge au ventre, et la casquette sur un bout de l’oreille. Je m’arrête parfois pour les écouter parler : c’est un poëme. J’ai vite recueilli