Page:Montpetit - Souvenirs tome I, 1944.djvu/175

Cette page a été validée par deux contributeurs.

174
SOUVENIRS

mirable, plein de mots qui jaillissent. Il parle comme il écrit ses articles. J’ai conservé de cet homme de juste milieu, de sens commun, une impression très vive. Il m’est apparu plein d’esprit, de douceur et d’humanité.

Je lui dis la place qu’il occupe chez nous. Nous utilisons sa pensée à l’enseignement des nôtres. Il a de gros succès de librairie au Canada français. Ses livres sont attendus. Je mentionne en passant L’Anticléricalisme. Il paraît enchanté. « Tant mieux, me dit-il, tant mieux. »

Je l’observe à mesure que la conversation se déroule. Il est rivé à son fauteuil à cause d’un accident : une jambe cassée.

— Je n’ai pas fait mon cours cette année, mais je le reprendrai.

— Et vous n’avez pas lu votre magnifique discours lors de la réception de René Doumic à l’Académie française ?

— Non, me réplique-t-il, je ne le pouvais pas. Aller donner son cours en boitant, soutenu par un huissier, cela peut se faire, cela est même chic. Je le ferai l’an prochain. Mais aller à l’Institut en habit vert, avec une jam-