Page:Montpetit - Poissons d'eau douce du Canada, 1897.pdf/55

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
35
DES POISSONS

tête sur mes pieds. Je trouvai le fait extraordinaire, mais sans m’y arrêter, j’examinai le crâne du poisson, et reconnus qu’il allait bien. Je me promenai alors le long de la pièce d’eau pendant quelque temps ; le poisson ne cessa de nager en suivant mes pas, tournant quand je tournais ; mais comme il était borgne du côté qui avait été blessé, il parut toujours agité quand son mauvais œil se trouvait en face de la rive, sur laquelle je changeais la direction de mes mouvements.

« Le lendemain, j’amenai quelques jeunes amis pour voir ce poisson ; le brochet nagea vers moi comme à l’ordinaire. Peu à peu il devint si docile qu’il arrivait dès que je sifflais et mangeait dans ma main. Avec les autres personnes, au contraire, il resta aussi ombrageux et aussi farouche qu’il l’avait toujours été. »

L’histoire de ce brochet reconnaissant n’est-elle pas de nature à nous donner une idée toute nouvelle des facultés qui ont été accordées aux poissons, et que, généralement, on est loin de leur reconnaître ?


PARASITES DES POISSONS


Il est facile de comprendre que les poissons échappent à toutes les maladies qui se prennent dans l’air et sur terre ; mais, en revanche, ils deviennent la proie d’une infinité de parasites animaux et végétaux, qui rongent les intestins, pénètrent dans leur bouche, se logent dans leur chair ou s’attachent à leurs flancs. La majeure partie des ables porte dans le canal intestinal des ténias ou vers solitaires, et des ligules dans leur abdomen. On les voit quelquefois pris comme de folie, remonter sur l’eau en tournoyant, puis mourir. Ce fait provient de l’invasion du cerveau par un ver blanc filiforme.

La brême possède un véritable assortiment de parasites intestinaux : le brochet, l’anguille, le hareng, l’épinoche, la carpe, le silure, le saumon sont rongés par des vers intestinaux, des pous ou argules foliacés, des helminthes, et cent autres ennemis qui leur causent de cuisantes souffrances ; l’esturgeon a le dichelestium et la hideuse lamproie ; la morue a le cymothoë, que les pêcheurs du Labrador appellent son médecin, parce qu’elle n’en paraît pas affectée ; le maquereau nourrit les lernéides, espèce d’annélides suceurs qui s’attachent à ses branchies ; il y a, en outre, les hypérines, crustacés voisins des crevettines, qui pour la plupart vivent en parasites sur les poissons et les méduses, dont elles sont leur nourriture.