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LES POISSONS

nomène. En outre, on remarque, des deux côtés, d’anciens golfes séparés maintenant de la mer libre par des plages basses et d’étroites flèches de sable. Le lac des Eskimos, situé près du delta que forme le Mackenzie, serait un de ces estuaires séparés peu à peu de l’Océan : les pluies et les rivières venues de l’intérieur ne l’auraient pas encore complètement purifié du flot salin qui l’emplissait, et l’eau en serait toujours d’un gout saumâtre ; toutefois le lac des Eskimos ou de Sitidji ne serait, d’après M. Petitot, que l’expansion d’une rivière peu considérable, le Natowdja, qui se jette dans la mer, à l’est du Mackenzie. Il n’a pas les énormes dimensions que lui attribuait Richardson, d’après le dire des indigènes. »

La source la plus méridionale de l’Athabaska, bouche principale du fleuve qui prend dans son cours inférieur le nom de Mackenzie, et qui fait l’objet principal de l’étude de cette partie de notre livre, est un petit lac situé sur le flanc oriental du mont Brown, dans la chaîne des Rocheuses : des voyageurs officiels l’ont appelé Committee’s Punch Bowl. De l’autre côté d’un col les eaux descendent à l’ouest vers la Colombie, tandis que au nord-ouest les neiges de la Tête-Jaune alimentent le courant du Fraser. Le torrent d’Athabaska, dit aussi le « Whirlpool River, » échappe rapidement à la région des montagnes, en s’enfuyant vers le nord-est, et se gonfle de plusieurs autres rivières, la Miette, le Baptiste, le McLeod, la Pembina ; du reste, la nomenclature hydrographique de ces contrées est fort confuse, chaque cours d’eau étant connu sous des noms différents, par les Indiens de diverses tribus et les Métis français et anglais. L’Athabaska lui-même est rarement désigné par cette appellation : les Canadiens ne connaissent que la rivière la Biche, terme qu’ils appliquent d’ailleurs à nombre d’autres cours d’eau. C’est à tort, dit M. Petitot, que l’Athabaska est appelé Elk River sur quelques cartes anglaises, car l’animal appelé autrefois « biche » par les voyageurs Boisbrûlés, n’est pas l’elk des Anglais, mais le wapiti ou « renne des rochers. » Un des lacs considérables de la contrée, le Petit lac des Esclaves, décharge ses eaux dans l’Athabaska, et d’autres lacs lui envoient le surplus de leurs réservoirs. Le fleuve s’est creusé un défilé profond de cent mètres entre des rochers de grès ; de distance en distance la vallée s’élargit et l’on voit des arbres recourber leur branchage au-dessus de l’eau claire. Au détour d’un méandre, des fontaines sulfureuses et salines jaillissent au milieu des prairies. En maints endroits se succèdent de ces « boucanes » ou évents volcaniques, éteints ou encore brûlants, que l’on rencontre surtout dans le bassin du Mackenzie. C’est au milieu de ces terres en fermentation que l’Athabaska vient se heurter contre un barrage de Barkmountain ou de « Montagne de l’Écorce, » et que l’eau commence à s’enfuir sur un plan incliné d’environ cent kilomètres en longueur : c’est la dalle du Grand-Rapide.