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LES POISSONS

sont des plus précieuses pour le commerce et la nourriture de l’homme. Il suffit de nommer ses quinze ou vingt variétés de saumons, ses truites innombrables, de plus de cinquante variétés, ses houlicans, tour à tour lampadaires, et thérapentes suivant qu’ils servent de flambeaux ou de remèdes contre la consomption : ses esturgeons, du poids énorme de plus de cinq cents livres, pour rejeter dans l’ombre l’énumération inépuisable de la faune ichtyologique de l’Amérique du Sud. En 1887, le Révd. L. Brown disait :


« Il n’est pas de côtes ou de rivières qui soient plus riches en poissons que celles de la Colombie anglaise.

« Au mois d’avril apparaît le célèbre houlican. Des milliers de ce poisson se pressent à l’embouchure de la rivière Fraser, où son arrivée est annoncée par des volées de goélands que l’on aperçoit au-dessus des bancs, guettant l’occasion de saisir leur proie et faisant retentir de leurs cris aigus les régions d’ordinaire si tranquilles du Fraser.

« Le houlican ressemble à l’éperlan, mais il est un peu plus gros et a un goût délicieux. Il est si huileux que l’on assure que celui que l’on prend au nord peut brûler comme une chandelle.

« Il est hors de doute que ce poisson ferait d’excellente sardine que l’on pourrait conserver dans sa propre huile. »


Mais revenons à la truite grise dont nous avons entamé le sujet, depuis le lac Supérieur, en continuant de le traiter par les provinces maritimes, le Labrador et le Manitoba. La connaissance de l’histoire naturelle des poissons se rattache rigoureusement à la géographie des pays, et surtout à la description des rivières, des lacs et des mers, s’il est question des poissons en général, des lacs et des cours d’eau, s’il ne s’agit, comme ici, que des poissons d’eau douce. La Colombie anglaise est un pays des plus pittoresques, comprenant une grande partie des montagnes Rocheuses que domine le pic élevé du mont Saint-Élie, qui secoue son panache de feu au-dessus des sombres horreurs du Pacifique, pendant que des serpents immenses ayant noms le Mackenzie, la Skeena, le Yukon, la Stikeen, le Fraser, les rivières la Paix, Pelly et vingt autres, se tordent à ses pieds, cachés sous sa robe de neige. Ces rivières, sorties de centaines de lacs, se roulent, s’enroulent, se brisent, se précipitent du haut de rochers de deux à trois cents pieds d’élévation, s’ouvrant des abîmes aux flancs des montagnes, se changeant, à leur tour, en lacs, en glaciers, en escaliers tournants par où remontent en troupes immenses, des esturgeons, des saumons, des truites de toutes couleurs et de toutes grandeurs.