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DES ENGINS DE PÊCHE

comment la lancer ? Une semblable canne, quand on s’en sert pour la pêche de fond, est déjà une solive peu commode à manier ; aussi, les paysans qui se servent de pareilles cannes pour la pêche du brochet, les laissent-ils à vau-l’eau appuyées sur le bord. Pour la pêche aux insectes, il faut tenir et toujours tenir la canne : peu de bras et de poignets y au contraire, résisteraient, et les pêcheurs doués de ces avantages d’Hercule se compteraient comme le phénix et ses descendants. Nous devons donc nous trouver mille fois heureux que la Nature ait pensé aux pêcheurs en faisant pousser le roseau, pour eux et leurs plaisirs.

Le pêcheur se procurera donc une bonne canne en roseau, en quatre brins, de 1 mètre 50 centimètres à 1 mètre 75 centimètres, ou en cinq brins de 80 centimètres à 1 mètre 40 centimètres. La seconde division, celle en cinq morceaux, est plus portative, ployée mais plus lourde et moins solide que la première en quatre, parce qu’elle a plus de viroles. On renforcera chaque entre-nœuds d’une ligature soignée et bien vernie ; l’on montera à la base de la canne, un bon picot d’acier, et l’on munira son extrémité d’un scion d’orme, d’épine ou de cornouiller, bien flexible et ligaturé également dans sa longueur. L’engin ainsi fait se trouvera parfaitement dans les conditions de flexibilité et de solidité nécessaires.

Muni de son moulinet libre, sur lequel un fin et solide cordonnet de soie bien verni et peint est enroulé, le pêcheur tient en main l’instrument qu’il a construit et qui doit répondre à tous les cas imprévus. Le choix du cordonnet n’est pas sans importance ; il faut que, par la nature de ses éléments, il soit capable de fournir sous le plus petit volume possible la plus grande résistance et puisse supporter, sans se détériorer, les alternatives de chaleur, de sécheresse et d’humidité auxquelles il serait cent fois par jour exposé. C’est pourquoi nous recommandons de peindre la ligne et de la vernir avec beaucoup de soin. Cette ligne aura 50 mètres de longueur sans nœuds, et il sera bon qu’elle puisse supporter, en l’essayant, un poids mort de 5 à 6 kilogrammes, afin d’être certain qu’elle résistera aux secousses d’un poids vivant de 2 à 3 kilogrammes au moins.

À l’extrémité de la ligne, on fera une boucle de 4 à 5 millimètres de long, soigneusement maintenue par une ligature en soie fine. Quelques pêcheurs se contentent d’y faire un simple nœud, et joignent la ligne à l’avancée par une demi-clef. Ce système offre bien assez de solidité ; il s’attache et se détache surtout en un clin d’œil, tandis que, avec la boucle, il faut passer dedans toute l’avancée pour que les deux soient liés ; ce qui, quand la ligne est mouillée, est souvent assez long.

La question de l’avancée est des plus importantes, car c’est la partie de la ligne que le poisson ne doit pas voir. La florence est la plus commode — mais non la meilleure — matière pour cet objet ; on en fera donc une avancée de la longueur de la canne. Cette avancée sera soi-