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LES POISSONS

Ici je reviens à mes notes de voyage. L’Étamamu est la propriété de M. Michel Blais, de Berthier (en haut), établi sur la Côte depuis quarante-six ans, qui vient de la quitter pour aller vivre de ses rentes dans sa paroisse natale. Deux de ses fils, de vaillants marins, continueront désormais d’exploiter la rivière. Déjà, cette année, ils ont tendu six pêches, mesurant en tout cent quatre-vingts brasses, mais ils n’ont pas été heureux, n’ayant capturé que dix barils, lorsque leur père en saumurait au moins cinquante barils chaque année. Une année même, le père en a mariné jusqu’à cent cinquante barils.

Les fils Blais attribuent cette défection à l’invasion de myriades de méduses (soleils de mer), poussées dans la rivière par une violente tempête du sud, avec saute au sud-ouest, qui a duré deux jours, à l’époque de la remonte du saumon dans les rivières de cette région, du vingt au vingt-deux juin.

Les corps des méduses flottant d’abord sans direction, comme des glaçons, se tassèrent bientôt à la rive, empêchant l’ascension du poisson, et finirent par corrompre les eaux au point de dégoûter et de chasser le saumon. Ils admettent toutefois, avec le capitaine Joncas, de Natashquan, que la tempête de vent d’ouest qui a tenu le saumon au large, à l’entrée de cette dernière rivière, peut avoir eu le même effet à Étamamu.

Il est notoire que nos plus vaillants pêcheurs de la côte nord viennent presque tous de la côte sud — depuis Lévis jusqu’à Gaspé.

J’ai remonté la rivière Saint-Augustin jusqu’à près de cinquante milles en profondeur, sans y trouver des fosses extraordinaires — je veux parler de la branche est — mais à tout hasard, elle peut fournir, à bien des endroits, de fort bons coups de ligne.

Il ne me reste plus qu’à signaler la rivière Saint-Paul ou des Esquimaux, que je n’ai pas visitée, mais au sujet de laquelle on m’a rapporté ce que voici :


« Propriété d’un M. Chevalier, qui, par défaut de diligence, d’intérêt ou d’ambition, ne retire assurément pas un dixième de ce qu’elle pourrait produire, si elle était exploitée avec plus d’énergie. En 1889, ce monsieur a mariné cent barils, lorsque, de l’avis de pêcheurs expérimentés, la rivière pourrait rendre, sans en souffrir, de huit cents à mille barils par année.

N’oublions pas que cette rivière des Esquimaux a donné jadis, en une saison, aux pêcheurs français, un rendement, non pas de 52,000 livres, comme on l’a écrit, mais bien de 52,500 saumons, ce qui est loin d’être la même chose.