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LES POISSONS

présenter de travers au poisson, qui reçoit ainsi une rude tape en arrivant au sommet. Il importe de faire sauter cette roche si l’on veut prêter de la valeur au haut de la rivière, où, sur un espace de quarante milles d’une eau unie quoique courante, se rencontrent de très belles fosses.


Nous voici en face de la rivière Moisie, célèbre par ses mines de fer magnétique, exploitées jadis avec perte par une compagnie de Montréal. Sept hauts fourneaux en ruines, une église protestante qui porte son clocher sur le coin de l’oreille, un cimetière, voilà tout ce qui reste, à votre droite, là, sur ce fond de sable jaune souligné par une raie noire de sable magnétique dessinant les courbes du rivage — de plusieurs centaines de mille piastres jetées au vent d’une agitation fébrile, d’un tourment d’ambition désordonné qui déroutait les meilleurs esprits. Espérons que cette semence germera un jour des millions. À gauche, un modeste village, sans rues, sans verdure, des vignaux, un ranc, des bateaux de pêche échoués au rivage, un clocher de chapelle catholique qui dépasse juste les toits ; là-bas, une maison plus grande avec des dépendances ; c’est le magasin de la maison Fraser & Co., propriétaire des premiers dix milles du cours de cette rivière qu’elle exploite à son profit, moyennant une rente nominale de mille piastres par année.

Au-dessus des dix milles, en pleine forêt, s’élèvent trois ou quatre cottages que viennent habiter, dans la belle saison, des sportsmen des États-Unis, de l’Ontario et de Montréal. Ils y font des pêches magnifiques de saumons de première qualité sous tous rapports.

Le rendement annuel des pêches de la Compagnie Fraser est évalué à environ 100,000 livres.

À soixante-dix milles plus bas que Moisie s’ouvre la grande avenue des sauvages montagnais en route pour leurs champs de chasse, la rivière Saint-Jean. La marée s’y fait sentir jusqu’à vingt-trois milles de son embouchure. Bon an, mal an la pêche rapporte environ 15,000 lbs de saumon, mais c’est un poste important pour la pêche à la morue. Le sol en est profond et propre à la culture.


Mingan est une rivière fort accidentée, ce qui n’empêche pas le saumon de la gravir jusqu’à soixante milles dans l’intérieur, pour y frayer. Quoique réputée bonne rivière à saumon, elle doit sa renommée, avant tout, à son excellent port et au poste de la Compagnie de la baie d’Hudson, que sir Donald Smith (lord Glencoe) a dirige pendant plusieurs années.


La rivière Romaine ou Mountage, à neuf milles au-dessous de Mingan, quoique petite, est très fréquentée par le saumon. Ce poisson se repose longuement au pied des premiers rapides, en vue du fleuve.