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LES POISSONS

Livrées désormais aux corroyeurs, au lieu d’orner la tête des cavaliers et des blondes, comme au bon vieux temps, les peaux d’anguille servent de renforts aux souliers, de cordons, de courroies ; au lieu de se mêler aux fleurs, ornements de la coquetterie, elles se rangent franchement dans l’industrie, qui, Dieu merci, bat aujourd’hui la marche dans la voie du progrès.


PRÉPARATION DE L’ANGUILLE


D’après le docteur Sauvage, « on fait à Comacchio deux sortes de commerce de poissons : le commerce du poisson frais, le commerce du poisson préparé :


« Les anguilles subissent une première opération. Un ouvrier, à l’aide d’une petite hachette, leur coupe la tête et la queue, et fait du tronc, suivant la grandeur du poisson, un ou deux tronçons égaux : tous ces tronçons sont enfilés dans des broches ; les plus petites anguilles, après avoir subi une ou deux entailles qui en rendent la torsion plus facile, sont repliées en zigzag. Les broches sont placées au-dessus d’un feu que l’on conduit avec le plus grand soin, car il y a un degré de rissolé qu’il ne faut pas dépasser, sous peine de n’obtenir que des produits de qualité inférieure. La graisse qui s’écoule des broches est recueillie et sert en partie à l’entretien des lampes de l’atelier, de sorte que rien ne se perd dans cette exploitation bien entendue.

« D’après les recherches de Coste, cette coutume de faire cuire des anguilles à la broche, soit entières soit coupées par tronçons, remonte aux anciens Romains, comme le prouvent deux peintures trouvées à Pompéi, sur le pilier extérieur d’une hôtellerie découverte près des Thermes ; les figures qui y servaient d’enseigne représentent, l’une une anguille entière repliée sur elle-même et embrochée, l’autre trois tronçons enfilés à la même broche.

« Après avoir retiré les anguilles des broches, on les entasse dans des barils, par couches régulières, et on les arrose d’un mélange de fort vinaigre et de sel gris. Après avoir été marqués, les barils sont prêts à être expédiés. »


Au Canada, l’anguille figure sur nos marchés à l’état frais, fumé, mais le plus généralement salé.