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L’ANGUILLE

« Il est aujourd’hui bien démontré qu’il y a des anguilles mâles et des anguilles femelles. D’après Émile Moreau, les ovules mâles sont formés d’une enveloppe mince et d’un contenu granuleux ; les ovules femelles, plus gros et mesurant environ deux dixièmes de millimètre, ont une membrane vitelline épaisse, transparente, un vitellus d’aspect granuleux, une vésicule germinative et une tache germinative plus ou moins distinctes ; autour de la vésicule germinative sont réunies les granulations vitellines plus ou moins nombreuses.

« Benecke, Syrski, Packard, Hermes et d’autres naturalistes encore ont étudié, dans ces derniers temps, l’anatomie de l’anguille. Les organes femelles ou ovaires se présentent avec l’aspect de deux cordons de couleur jaunâtre ou rosée, fortement plissés, situés à droite et à gauche du canal alimentaire, renfermés dans un repli du péritoine et venant s’ouvrir à l’extérieur par un petit pertuis. Ces organes se développent peu à peu, de telle sorte que chez les animaux jeunes on ne trouve à leur place que deux masses graisseuses ; pareil fait se remarque, du reste, chez beaucoup d’autres poissons, chez le hareng par exemple. Chez l’animal adulte on trouve des ovules bien développés ; le nombre des œufs contenus dans les deux ovaires a été estimé à environ cinq millions.

« Chez l’anguille mâle on voit à certains moments de l’année deux organes très allongés et minces également situés de chaque côté du tube digestif et présentant une série de lobules : ces organes se distinguent de ceux de la femelle, non seulement par leur aspect lobé, mais encore par leur apparence luisante, vitreuse et lisse ; en plus, le tissu de l’organe est plus ferme, plus résistant. Les lobules de l’organe déversent leur produit dans un canal qui va aboutir à un pore externe semblable à celui que nous avons signalé chez la femelle. Les lobules eux-mêmes se composent d’une série de glandules renfermant des globules granuleux. »

Certains observateurs, comme Jacoby, Syrski et autres prétendent que les mâles sont toujours de plus grande taille que les femelles ; d’autres prétendent le contraire et affirment que les plus grandes anguilles pêchées à Trieste et à Comacchio sont des femelles. On vous dira aussi que les femelles ont le bec plus pointu, plus effilé : certaines gens trouvent aux anguilles femelles de Comacchio, une couleur plus claire, généralement une couleur verdâtre sur le dos, une teinte jaunâtre sur les flancs, les mâles étant d’un vert foncé tournant au noir avec des reflets métalliques ; chez les femelles la nageoire dorsale est plus haute que chez les animaux de même taille que l’on suppose être des mâles ; presque toujours l’œil est proportionnellement plus grand chez ceux-ci que chez les femelles.

La merveilleuse découverte annoncée par le journal de Paris que j’ai cité plus haut perd ainsi tout son éclat, à la lumière de la science. Il ne