Page:Montpetit - Poissons d'eau douce du Canada, 1897.pdf/23

Cette page a été validée par deux contributeurs.
3
DES POISSONS

mince et presque invisible. En quelques secondes, cette enveloppe se gonfle au contact de l’eau, et les spermatozoïdes de la laitance ne peuvent plus parvenir à la substance de l’œuf. La fécondation, en ce cas, n’a pas lieu. Dès que la matière gluante qui enveloppe les œufs est gonflée par l’eau, la fécondation ne s’opère plus. C’est grâce à l’instinct particulier qui pousse, à l’époque du frai, les mâles à suivre les femelles, que la race des poissons ne disparaît pas du monde. Cependant, des œufs recueillis dans le ventre d’une truite, morte depuis trente-six heures, ont été favorablement fécondés, par la méthode artificielle, bien entendu.

En réunissant un certain nombre d’œufs, les pressant jusqu’à les briser, en les arrosant de laitance, au moment propice, on est arrivé à produire des petits monstres curieux et intéressants au possible, à deux, trois et quatre têtes, des croisés se tenant par le ventre, ayant deux têtes et deux queues, des jumeaux en forme d’équerre, d’hélice, ayant vie et force, mais fatalement impuissants à se reproduire. Le cyprin doré de la Chine, le poisson de la Pompadour, nous en fournit de fréquents exemples, à Montréal même, dans les vitrines de nos apothicaires.


Fig. 1. — Œufs et alevin du saumon, avec vésicule ombilicale.


Au moment où l’œuf vient d’être fécondé, son contenu se trouble et devient plus opaque ; mais peu à peu la transparence primitive reparaît, et il reste à l’intérieur une petite tache circulaire qui n’y était point avant la fécondation. Cette marque n’est cependant pas un signe absolu de la fertilisation de l’œuf, car elle se développe aussi, mais plus tardivement, dans ceux qui sont restés stériles.

Bientôt, une ligne arquée se fait voir dans l’œuf fécondé, c’est le cœur du petit poisson en germe, dont on distingue très bien, à la loupe, la tête avec ses petits yeux noirs, et la queue. Les mouvements de la queue sont très visibles et servent à déchirer l’enveloppe quand le jeune animal a acquis les forces voulues pour cela.