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LE CULTE DE L’INCOMPÉTENCE

une rançon. — Quel est donc le prix de ce nivellement, et qu’avens-nous donné en échange de la suprématie du nombre ? Nous avons consenti un culte nouveau, exigeant, suprême : celui de l’incompétence.

Il est périlleux d’en parler. Il fallait être Faguet pour se payer ce luxe. Il manquait à l’académicien d’être pamphlétaire. Il s’est permis ce geste ; il y réussit à souhait, sans pose. Son ironie est fine et douce. Il sourit avec gravité ; et j’admire comme il s’appuie nonchalamment sur Aristote pour gourmander nos démocraties modernes.

Si je n’avais pas le désir de pousser timidement mes compatriotes vers la lecture attentive de ce livre, je m’arrêterais là, crainte de mal traduire, dans une analyse brève, le charme de cette dialectique aimable et pondérée. Aussi bien me bornerai-je à parcourir les premières pages de l’ouvrage, qui en précisent l’esprit et le principe.



L’homme est un animal sociable. Cet adjectif inélégant atténue la brutalité du mot qu’il accompagne. C’est sans doute parce qu’il est sociable que l’homme vit en société, et parce qu’il est un animal qu’il a besoin d’une gouverne. Quoiqu’il