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Ce passé dans les yeux, il s’élança vers la vie. Il heurta aussitôt la réalité vivante et multiple. Quoiqu’il les possédât en lui-même, il ne sentait plus autour de lui les grandes forces d’hier. Le présent se matérialisait en des œuvres de passion, parfois de haine. Il s’exerçait à comprendre son temps au prix de ses aspirations épuisées. L’âpreté de la lutte pour la domination, la course à la richesse, le tourment de paraître, la mesquinerie des moyens, toutes ces contingences d’où jaillit souvent, par réaction, une beauté et que l’histoire atténue et néglige, qui sont le bouillonnement d’où monte l’avenir, lui faisaient croire à une sorte de décadence prochaine. Il eut peur, sans cesser un instant d’espérer ; il eut peur, et il eut conscience de sa tâche. La France lui apparut désorientée, menacée. Ce ne fut qu’un moment. Son regard, plus habitué, comprit. Son pays, comme naguère, entraînait l’humanité sur les chemins de l’expérience, s’offrant lui-même aux aspérités. Il vit partout des rêves s’agiter dans un souffle de révolte. L’industrialisme-roi fomentait des systèmes qui se tournaient contre lui ; l’usine fabriquait des idées, qui venaient saper les vieilles contraintes d’un passé impuissant ; la question sociale, que l’on ne pouvait plus nier, se posait, impérieuse, aux anxiétés de tous. Cela même détermina sa résolution. Au matérialisme de l’heure, il opposa l’idéalisme de