Page:Montpetit - Au Service de la Tradition française, 1920.djvu/54

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

tant bien que mal, au prix de lourds et durs labeurs. Louis Veuillot sentira tout le poids de ces épreuves. Plus tard, dans Rome et Lorette et dans les Libres Penseurs, il évoquera les heures sombres de sa jeunesse et la courageuse tâche « de l’ouvrier chargé de famille qui ne suffit que par miracle au besoin du moment ».[1] À côté de son père, il connaît la grande loi du travail. Tout de suite, il s’y soumet. La nécessité le pousse à lutter à son tour, à se forger, aussi lui, un outil qu’il maniera, comme son père, le jour et la nuit, qu’il gardera jusqu’à la fin, demandant qu’on le place d’abord à ses côtés dans le cercueil.

À Bercy, il fréquenta l’école mutuelle, dont il lui resta mauvais souvenir mais où l’amitié d’un professeur lui valut d’apprendre un peu de latin. Au sortir de l’école, il dût chercher sa voie. Où ira-t-il ? Si peu de portes peuvent s’ouvrir devant lui ! Il n’a pas de projets très arrêtés. Il fera ce qu’on voudra de lui ; pourtant, une ambition le possède, toujours la même, aussi ancienne que ses premières lectures : étudier. Il en fait part à ses parents. Le père hésite, la mère approuve d’enthousiasme. Elle se dit que son fils sera jurisconsulte ! Le mot importe peu. Il suffit que la mère ait deviné son enfant et qu’elle soit à l’origine

  1. Voir l’Attitude sociale des catholiques français au xixe siècle, par l’abbé Callippe, 3ème vol, pp. 21 et suivantes.