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Ses amis ? Ils sont beaux, ses amis. Il est entourée de convoitises et de trahisons, d’intrigues à peine voilées, de flatteries énormes. Personne à qui se fier : le pouvoir a-t-il des amis ? C’est un radeau dans un naufrage. Après une longue maladie, suite d’un second duel, Lescœur prend la ferme résolution de couper les liens qui l’attachent à la politique. Il a regardé, il a touché la mort, le brusque arrêt, la fin de tout. Un éclair de raison lui a fait voir l’inanité de son existence de fièvre. Il a retiré de cet abîme un désir encore, destructeur de tous les autres, un désir de liberté, d’indépendance. Il démissionne. Il cède la place, non sans dessein, à l’ineffable Dargeau : « Adieu, Messieurs ! Ramez seuls sur les galères de Sa Majesté ! Le forçat libéré vous bénit, et que Dieu vous garde ! »…

Il se retire à Verceil, où il sait qu’il retrouvera Louise. Verceil ! son premier amour, né à l’ombre romane de la vieille église. Son cœur tari, épuisé, se reprend à espérer. La douceur de ce retour le réchauffe. Il vivra, à côté de Louise, en ami de toujours. Leurs paroles ressusciteront le passé. Ils n’ont pas été heureux : peut-être trouveront-ils une consolation à chercher ensemble les raisons de leur infortune ? Le calme d’une telle retraite, n’est-ce pas enfin le vrai bonheur ? Tout le reste est fausseté. Ils le savent : ils en sortent. Aussi