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quand l’employé de chemin de fer s’est incliné à ce seul laissez-passer, impératif et bref : député.

Le voilà à la Chambre. Son regard se pose avec satisfaction sur ce décor dont il sera quelque chose, aux jours de grande séance. Quelques collègues sont là qui l’acclament, l’ayant pris pour un autre : c’est une miette du festin, qu’il ramasse avec contentement. Devant lui, du papier où brillent les mots fatidiques, affirmation de sa conquête : Chambre des Députés. Il fréquente les couloirs, la buvette. Les huissiers se courbent sur ses pas. Son nom est dans tous les annuaires. Il est bien de la maison : il a voté une première fois.

Aussitôt, le désir de monter l’aiguillonne. Il dit de ses collègues « qu’ils ne sont pas forts. » Il les juge, c’est donc qu’il s’arroge le droit de les conduire. Son ambition lui a déjà réussi. Pourquoi lui imposerait-il un répit qui serait une défaite ? Il a trop attendu des circonstances, qui sont aveugles. Il n’a pas percé. Son nom est toujours suivi de la seule mention : député. Il n’est rien de plus que ce Georges Dargeau, qui a succédé à M. Lorgeril, et qui lui tend chaque jour sa main grasse. Le grand public l’ignore. Devant ce résultat, trop maigre à son gré, il s’inquiète de nouveau. Se serait-il trompé ? Agir, est-ce attendre ? L’homme doit-il rester en place et se laisser emporter par l’occasion, quand elle passe ? Au