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frir pour elle. Cependant, pour que notre défense, qui est admirable, soit plus complète et plus sûre, ne devons-nous pas ajouter à l’amour le respect ? Nous comprenons fort bien que, vivant loin de France et au contact de nos voisins, nous ayons façonné des mots douteux, sinon même horribles, et réduit notre vocabulaire à une inquiétante pauvreté. Encore cette défaite n’était-elle, souvent, qu’une victoire déguisée : nous avons forgé « marchandises sèches » pour ne pas dire dry goods, et de la rue Saint-Germain devenue German Street nous avons fait rue des Allemands, puis, bien avant la guerre, rue de l’Hôtel de Ville. C’est ce que ne voient pas ceux qui nous font une visite hâtive et distraite, et qui s’empressent d’écrire à notre sujet les plus cocasses inexactitudes. L’abbé Klein raconte quelque part qu’ayant fait, aux États-Unis, la connaissance de deux fils de Français, il s’étonna vivement de les entendre parler uniquement anglais. Ils savaient à peine d’où ils venaient et ne connaissaient guère, de toute la France, que Paris. Une telle aventure est peu commune, au Canada. N’y a-t-il pas, d’un autre côté, quantité de mots dans notre langue canadienne qui sont seulement vieux ou d’une origine provinciale : gadelle, par exemple, ou arcanson, pour ne citer que ces deux-là qui nous ont servi maintes fois à une amicale démonstration. Tout cela est vrai ; mais