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Si la critique doit être indépendante et être libre d’attaches, elle ne saurait renoncer à toute discipline. C’est un des plus grands mérites de M. Camille Roy que de l’avoir compris et, ayant à juger l’esprit des autres, d’avoir assujetti sa pensée à un certain travail de préparation. Sans cela, l’œuvre critique risque d’être inutile. Car tout s’apprend : le métier, l’art, la science ; et tout se cultive : la pensée, la sensation même et l’expression. L’artiste est un homme de métier et le suprême de l’art est qu’il n’y paraisse rien. Le critique est un juge qui prononce selon des lois, et un psychologue qui sonde les sensibilités.

M. Roy a pratiqué les grands critiques : Sainte-Beuve. Taine, Faguet, Lemaître et, surtout, Ferdinand Brunetière dont il a de préférence adopté la manière. Il a lu Paul Bourget chez qui le psychologue littéraire a déterminé le romancier et, par une évolution logique, le dramaturge. De l’assiduité de ce commerce, M. Roy a retiré le bénéfice d’une méthode : il a acquis une tournure d’esprit plus propre à l’expression critique. Il a de l’école. Ses articles se tiennent. Ses livres, par leur composition, la disposition des matières, leur aspect extérieur et même leurs titres, rappellent la manière de faire des maîtres français. Et cela n’est pas sans intérêt ni sans importance, si cela complète fort heureusement l’initiative littéraire de M. Roy