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De ses vers, dont on n’a pas suffisamment apprécié la tenue, émerge une sombre tristesse qui goûte l’heure du crépuscule et les saveurs mortes de l’automne,

Ils sont tous là mes rêves morts
Drapés d’un manteau de tristesse,


un pessimisme ardent, qui voudrait être impassible et silencieux, sur lequel quelques critiques se sont leurrés. Je ne dis pas qu’il ne soit pas sincère puisque les dispositions d’esprit du poète l’eussent, à elles seules, engendré ; mais il est aussi, pour reprendre l’expression de Maurice Rollinat,

Le savoureux tourment de son art volontaire

Écoutez plutôt le poète nous avouer que :

Nos œuvres sont le fruit de tous les souvenirs
Que nous faisons revivre en d’austères études.
Tels sont l’amour brisé, les doutes, les désirs
Dont nous reproduisons les fières attitudes…

Ce pessimisme, d’ailleurs, est bien dans la tradition si, né d’un ennui réel ou d’un dégoût des lèvres, il se résout en une universelle pitié, si l’influence de Sully Prudhomme, comme cela fut dans la suite de l’histoire littéraire, corrige ce qu’il avait emprunté de farouche et de dur aux blasphèmes d’Alfred de Vigny, aux dédains de Leconte de Lisle

C’est un jeu dont on peut apprécier différemment le mérite ; mais qui a certainement eu, s’il a été