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LUMIÈRE DU NORD

un abri, et qui se distingue aujourd’hui dans le mortel anonymat du progrès, comme un hors-série de l’édition multipliée à l’infini dans l’habitat américain, où la maison de campagne anglaise et la maison coloniale gardent aussi une personnalité pleine de charme. D’origine européenne, elles déploient plus librement leurs lignes dans un espace moins restreint, et leur confort, à la périphérie des villes, abrite le secret du home, ou de ce que les Anglo-Saxons appellent le home, lequel est de France, disait Alfred de Foville, plus que d’Angleterre où la famille particulariste se disloque au gré des intérêts et où les clubs, auxquels le caractère français ne se pliera jamais, prennent un bon quart de la vie citadine.




Qu’attendons-nous pour prolonger le rêve des humbles artisans venus de France ? Sommes-nous devenus trop jeunes ? Ou, si nous avons vieilli, avons-nous dégénéré ? Sommes-nous déjà abrutis de standardisation ? Qui ne s’est livré au jeu de renouveler notre province au souffle de l’esprit français ! Regardez, en arrachant le masque qui défigure, Montréal accentuer ses traits comme un être grandi normalement. Les proportions modérées des immeubles flanquent les boulevards aux lumières discrètes. Les quartiers de résidence n’ont plus leurs verrues. Dans la banlieue, des maisonnettes, au toit incliné, comme on ne se lasse pas d’en admirer à Outremont, rappellent, dans un enveloppement canadien, le passé normand ou breton. Le soleil égaie le calcaire bleu