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LE FRONT CONTRE LA VITRE

France a renoncé et c’est correct, le grand mot des Chapdelaine, veut tout dire, comme le righto londonien ou le ça va français ou belge. Il en est presque ainsi de traductions qui font image et qui écartent l’anglicisme, sinon le vocable anglais ; par exemple, pour ne pas recourir au mot square que d’ailleurs nous prononcerions à l’anglaise, nous disons couramment le « carré Saint-Louis » ou le « carré Viger ». Qui donc, au passage, soupçonnerait un stratagème ? Quel parisien n’inscrirait pas sur son carnet de route : carré, mot bizarre, pas français. Square non plus. Tout est là. C’est tout à fait cela, encore que ce soit absolument le contraire, comme aimait à dire un critique : car, dans le vieux français, esquarre signifiait tout de même carré.

Et voilà la défense de chaque jour contre l’envahissement, le corps à corps qui provoque une francisation intéressante, dont on a dit du mal quoique des esprits d’élite en aient pensé quelque bien. Elle est assez simpliste comme tout ce qui vient du peuple : avec quelques suffixes que lui suggèrent l’analogie et la métaphore, des suppressions de consonnes et des raccourcis qui détruisent le caractère anglo-saxon, une seule conjugaison, qui est naturellement la première, des dérivations parfois inattendues, elle crée des êtres d’apparence hybride dont la formation retient le philologue. Son grand mérite, c’est d’être une francisation par l’oreille et par une oreille qui est et qui veut demeurer française. Le Français, le fait est connu, francise aujourd’hui par les yeux : il lit des mots qu’il s’évertue à prononcer suivant leur