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LE FRONT CONTRE LA VITRE

Les « officiels » prennent place sur l’estrade flanquée d’oriflammes fleurdelisées, et d’où la ligne modérée des montagnes rayonne dans l’air que filtre un rideau de peupliers. L’uniforme marin et la jaquette noire touchent la pourpre cardinalice et l’amarante épiscopale. Des détachements alignent leurs armes disparates : sailors sanglés de jaune, pompons rouges que le peuple acclame, soldats canadiens vêtus de kaki. Gaspé s’étonne d’un pareil déploiement.

Une voix canadienne, celle du lieutenant-gouverneur de la province de Québec, M. Patenaude, — un nom prédestiné — apporte à la France « l’expression de la plus affectueuse bienvenue » sur cette fin des terres où revit, comme sur l’estuaire de la Gironde, « la moisson que rien ne déracine plus ».

Quand le voile tombe, des pièces pyrotechniques lancent vers le ciel des drapeaux qui se déploient avec des mouvements de poussins sortant de leur coquille, et battent quelques instants sous des parachutes. Une bourre tombe aux pieds d’un journaliste : cette manifestation, d’ailleurs captivante, nous vient du Japon !

La croix est de trente pieds comme Cartier avait voulu que fût celle qu’il planta ; mais cette fois elle est de granit, d’un granit encore rugueux, et d’une seule pièce. Elle entre dans le temps, précédée des granits bretons que je viens de toucher aux Portes-Cartier et à Sablons, où ils patinent de froid les maisons et les maîtres-autels.

La parole reprend. Le premier ministre du Canada lit un message du Roi d’Angleterre qui met