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AU PAYS DE LA DÉCOUVERTE

de noblesse, à la rencontre de Jacques Cartier, renouvelant, sur un rythme français, une scène de la découverte. L’écho multiplie l’applaudissement rauque des moteurs. Des clameurs se mêlent : « Vive la France », « Vive le Canada » ; l’une monte du peuple, l’autre descend du navire. Des Français nous embrassent, comme s’ils voulaient étreindre en nous notre pays.

Nous attendions cette minute, épreuve de la fidélité ; notre longue méditation lui avait prêté d’avance l’anxiété d’un retour. Il nous est infiniment doux qu’elle soit réussie à la française : par un geste. Le souvenir, en mous, est une force muette : qu’elle éclate ainsi, au grand jour, nous gonfle le cœur jusqu’aux larmes. D’autres manifestations auront lieu, des fêtes aux caractères innombrables : l’accueil de Québec, une foule de trois cent mille figures à Montréal ; mais l’arrivée à Gaspé restera une inoubliable communion.

Sur la place publique, on inaugure la croix qui perpétuera le souvenir de la prise de possession du 24 juillet 1534. La croisière se dilue dans la foule. Des conversations s’engagent, les premières ! dans la langue qui garde chez nous des reflets d’aïeule :

— Vous aimez la France ? — Oui, mais j’aime aussi les Françaises !

— Vous êtes un Français… de France ? — Mais oui. — Je voudrais vous offrir une pièce ancienne que j’ai trouvée dans mon champ. — Que puis-je faire en retour ? — Écrivez-moi de France, « de temps en temps ».