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À LA MAISON DE L’ANCÊTRE

public, l’esprit de « civilité », disaient nos pères, de civisme, comme on dit depuis que les Américains ont mis le mot à la mode. Rivard, après avoir été un défricheur, devient un chef ; il mène de front les intérêts de son exploitation et les affaires de la collectivité qui s’est peu à peu cristallisée autour de lui.

Le récit, borné d’abord aux événements de la vie de colon, s’élève aux faits d’ordre politique et pose des questions nationales. Rivard lamente que nous possédions si peu d’esprit public, sans doute parce que nous n’avons pas fait un suffisant apprentissage des responsabilités sociales, surtout parce que nous n’avons pas reçu l’éducation nécessaire. L’observation est de 1862 : qui ne la ferait aujourd’hui ? Qui ne voudrait répandre davantage le sens social, le souci de l’intérêt général, le respect des droits et l’observance des devoirs qui naissent du fait de citoyenneté ? L’enseignement classique donne des leçons de civisme puisqu’il reprend, somme toute, l’expérience humaine ; et l’on croirait que la connaissance du passé est un avertissement suffisant. Les résultats prouvent le contraire : la leçon du passé doit être distinguée, elle doit renaître dans des principes généraux et faire l’objet d’une étude spéciale. Il faut que l’école entre dans cette voie et, sans céder un instant à l’esprit de parti, donne toute son importance au droit constitutionnel, à l’administration publique, à la philosophie sociale, au civisme.

C’est ce que Rivard a compris d’instinct, par droit de naissance littéraire. On voudra relire les