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LE GRAND SILENCE BLANC

voyageant dans l’ouest du Canada, eurent la joie, à Edmonton, « porte du Nord », de rencontrer Mgr Joussard, Mgr Grouard, le glorieux oublié à qui la France devait enfin remettre, en 1925, la Légion d’honneur, et l’« évêque du vent », Mgr Breynat, qui rêve d’un avenir prodigieux et qui voit déjà les forces hydrauliques du Mackenzie broyer les minerais. Ils ont consacré à ces évêques l’une des plus jolies pages de leur livre, De Québec à Vancouver. Et voici ce qu’ils écrivent, à la suite du portrait de ces « trois Français, robustes, d’une belle gaieté, et leur gravité épiscopale animée d’une joviale bonhomie » :

« La civilisation moderne est dédaigneuse, même un peu brutale. Elle laisse à l’écart les sauvages, frères inférieurs, cette race enlaidie par la souffrance et arrêtée dans son développement par un climat inhumain. C’est le dévouement des missionnaires qui paie la dette de l’humanité à ces déshérités du globe. Ils acceptent la terrible existence boréale, pour apporter aux malheureux les espérances du christianisme et leur enseigner quelques vertus. Nous sentons bien que c’est là chose plus haute et plus rare que tout ce que le génie humain peut inventer ou faire dans l’ordre de la connaissance ou de la beauté. »

Peu de temps après, Rouquette, envoyé du Consulat de France, porte la Croix de la Légion d’honneur à Mgr Grouard, là-bas, dans les blizzards, sur la colline qui domine le Petit Lac des Esclaves, à la Mission Saint-Bernard. À son retour, il lance