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habituel, ainsi que Zaïre. Il avait pris pendant quelque temps cette Zaïre dans un tel goût, qu’elle revenait continuellement et nous en étions fatigués. Je ne puis dire l’effet désagréable que j’éprouvais lorsqu’on demandait cette éternelle Zaïre, et lui pensait au contraire que ce sujet devait plaire à une femme. J’avais décidé avec le général Gourgaud que, si le goût n’en passait pas, nous perdrions le volume.

L’Empereur lisait agréablement, mais il n’avait pas l’oreille poétique ; il ajoutait souvent à un vers une ou deux syllabes et ne s’en doutait pas ; le livre sous les yeux, il changeait un mot et toujours de la même manière ; jamais, en lisant Cinna, il n’a dit autrement que : « Sylla, soyons amis, Sylla » Il lisait sans la moindre déclamation.

Si un vers, une tirade lui plaisait, il s’arrêtait, réfléchissait, exprimait ce qu’il sentait et motivait son opinion ; le jugement qu’il portait prouvait toujours son tact et son bon goût.

La lecture était souvent interrompue par ses réflexions, et alors une discussion de littérature la remplaçait.

Il blâmait l’usage de nos grands poètes d’in-