ne juge point un autre, si ce n’est celui qui est assez patient pour ne pas se défendre ? »
2166*(1 562. II, f°45o). — Tant de gens qui ont pris à la lettre les déclamations des Pères se sont imaginé que toute l’attention des Empereurs avoit 5 été occupée à empêcher les progrès de la Religion chrétienne. C’étoit la moindre de leurs affaires ; à peine y pensoient-ils. On a beau parler du crédit des prêtres payens ; ce crédit étoit très petit de luimême, et les ouvrages de Lucien sont une preuve 1o que les philosophes les avoient décriés d’une façon à ne pouvoir jamais se relever. La plupart des persécutions étoient occasionnées par des accidents particuliers, et il en devoit beaucoup arriver dans un empire où régnèrent tant de tyrans. Nos écri- 15 vains ont ramassé tous les faits et ont fait un corps d’histoire de toutes les souffrances des leurs. Mais il est toujours vrai de dire que, dans un État où une partie étoit sans cesse proscrite par une partie, où la soif de l’or, de la vengeance et du sang, faisoit 2o qu’on ne cherchoit la plupart du temps que des coupables, la Religion ne fut souvent plutôt le prétexte que la cause de tant de meurtres.
Je sais bien que les premiers Chrétiens ne défendirent point leur cause propre ; qu’ils rendirent 25 témoignage non pas de leur innocence, mais de leur foi. Mais je dis que les Empereurs n’avoient point de zèle pour leur religion ; que la plupart étoient des monstres, qui n’avoient aucun plan ; que Néron ne voulut que rejeter sur eux ses crimes et sa folie, 3o