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plus exigé des auteurs, on a moins exigé des critiques.

Il ne faut point critiquer les poètes par les défauts de la poésie, ni les métaphysiciens par les difficultés

5 de la métaphysique, ni les physiciens par les incertitudes de la physique, ni les géomètres par la sécheresse de la géométrie.

Chacun prend part aujourd’hui aux trésors qui étoient autrefois à peu de personnes ; mais, avec

1o cette petite partie, on croit avoir le tout : un scrupule d’or a paru la pierre philosophale ; avec des richesses partagées — chose admirable ! — tout le monde se crut trop riche ; la République des Lettres a été comme celle d’Athènes, où les pauvres

1â étoient plus considérés que les riches.

On dédaigne, pour faire paroître de l’esprit. — Pourquoi l’esprit que vous avez est-il une preuve que les autres n’en ont point ? Quoi ! votre goût sera toujours infaillible, et l’esprit des autres leur man

2o quera toujours ! Comment ce partage si différent : que vous jugez toujours bien, sans exception, et que, sans exception, ils pensent toujours mal ? Vous êtes libre. Soyez-le donc de rendre justice aux autres 1.

838* (1g56. III, f° 257). — Ma réponse au Journal

35 de Trévoux : que, quand une chose a un sens qui

est innocent, il ne faut pas chercher un mauvais

sens, pour le donner à l’auteur ; et je le prouve

par le Journal de Trévoux même.

1. Voyez la page 243.