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XXI. ESCLAVAGE.


1935 (174. I, p. 154). — L’esclavage est contre le Droit naturel, par lequel tous les hommes naissent libres et indépendants.

Il n’y a que deux sortes de dépendances qui ne lui soyent pas contraires : celle des enfants envers leurs pères ; celle des citoyens envers les magistrats : car, comme l’anarchie est contraire au Droit naturel, le Genre humain ne pouvant subsister par elle, il faut bien que la puissance des magistrats, qui est opposée à l’anarchie, y soit conforme.

Pour le droit des maîtres, il n’est point légitime, parce qu’il ne peut point avoir eu une cause légitime.

Les Romains admettoient trois manières d’établir la servitude, toutes aussi injustes les unes que les autres.

La première, lorsqu’un homme libre se vendoit lui-même. Mais qui ne voit qu’un contrat civil ne sauroit déroger au Droit naturel, par lequel les hommes sont aussi essentiellement libres que raisonnables[1] ?

  1. D’ailleurs, il ne pouvoit y avoir de prix. L’esclave se vendoit ; tous ses biens cédoient (?) au maître, et, par conséquent, le prix de son agent (?). Le maître ne donnoit donc rien, et l’esclave ne recevoit rien. Donc point de prix. — De plus, un homme ne peut contracter que comme citoyen. Or un esclave n’est pas citoyen. La Nature l’a fait citoyen ; il ne peut contracter pour ne l’être pas.