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qu’ils étoient soumis à une puissance que la Nature avoit établie : car, l’enfance étant l’état de la plus grande foiblesse qui se puisse concevoir, il a fallu que les enfants fussent dans la dépendance de leurs 5 pères qui leur avoient donné la vie, et qui leur donnoient encore les moyens de la conserver.

Cette dépendance, qui, ayant précédé toutes les conventions, sembloit n’avoir de bornes, dans son origine, que l’amour des pères, s’est limitée de deux

1o manières : 1° par la raison des pères, lorsque, dans l’établissement des sociétés, ils l’ont bornée par les loix civiles ; 2° par la Nature, parce que, à mesure que les enfants sortent de la jeunesse, les pères entrent dans la vieillesse, et que la force des enfants

15 augmente à mesure que le père s’affoiblit. Le même amour et la même reconnoissance reste (sic) ; mais le droit de protection change.

Les pères étant morts ont laissé les collatéraux indépendants. Il a fallu s’unir par des conventions

2o et faire par les loix civiles ce que le Droit naturel avoit fait d’abord.

Il a fallu aimer sa patrie, comme on aimoit sa famille ; il a fallu chérir les loix, comme on chérissoit la volonté de ses pères.

25 1934 (1 179. II, f° 82 v°). —Je disois de la loi romaine qui permet aux pères de donner leur bien aux étrangers : « C’est un canon qui n’est pas chargé ; brutum fulmen. »