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1878* (2023. III, f’316v»).

Au Baron de Stein.

Amsterdam, ce 2o octobre 1729.

Je ne sais pas comment la conscience des gens de notre Conseil de France peut jamais aller bien. 5 Notre intérêt est d’empêcher qu’on ne détruise les Protestants, les Turcs et les Corsaires de Barbarie.

Si l’Empereur envahissoit le pays des Turcs, il y établiroit des manufactures qui détruiroient notre commerce du Levant. 1o

Sans les Corsaires de Barbarie, les Hambourgeois et autres villes anséatiques iroient faire le commerce du Levant.

Nous sommes catholiques et chrétiens, et nous avons à maintenir les plus mortels ennemis des uns 15 et des autres.

Nous avons une religion qui a un chef visible, et nos intérêts sont toujours directement opposés aux siens.

Il est vrai que, sous Louis XIII, nous fîmes la 2° guerre aux Huguenots ; mais je ne crois pas que Dieu nous pardonne jamais d’avoir voulu lui faire accroire que nous soutenions sa cause par zèle, et non pas pour prendre La Rochelle et Montauban.

Que si Louis XIV a chassé les Huguenots de la 25 France, on n’ignore point Là-Haut que ce fut par sottise et par une intrigue de cour que ce prince le fit : car, s’il avoit cru perdre ses manufactures, il aimoit trop l’argent pour faire une chose comme cela.

Je suis, Monsieur, 3o