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de réparer ses pertes. Ses voisins la craignent, et ses ennemis déclarés sont toujours encouragés par des ennemis secrets.

1. Mis dans le livre X» des Loix.

Elle n’est propre qu’à servir aux desseins de quelque grand État. Mais, si elle a des succès, elle est 5 bientôt arrêtée par la puissance même qui la fait agir.

Charles XII, qui n’employa que ses seules forces, détermina sa chute en formant des desseins qui ne pouvoient être exécutés que par une longue guerre, 1o chose dont son royaume n’étoit point capable.

Ce n’étoit pas un empire qui fût dans la décadence qu’il entreprit de renverser, mais un empire naissant. Les Moscovites se servirent de la guerre qu’il leur faisoit comme d’une école. A chaque défaite, ils 15 s’approchoient de la victoire, et, perdant au dehors, ils apprenoient à se défendre au dedans.

Charles se croyoit le maître du Monde dans les déserts de la Pologne, où il erroit, et, dans lesquels, la Suède étoit comme répandue, pendant que son 2o principal ennemi se fortifioit contre lui, serroit son royaume, s’établissoit sur la mer Baltique, détruisoit ou prenoit la Livonie.

La Suède ressembloit à un fleuve dont on coupoit les eaux dans sa source, et dont on les (sic) détour- 25 noit dans son cours.

Ce ne fut point Pultova (sic) qui perdit le roi de Suède : s’il n’avoit pas été détruit dans ce lieu, il l’auroit été dans un autre. Les accidents de la fortune se réparent aisément ; ceux de la nature des 3o choses ne se réparent point.